PRÉTENTIONS DE LA MAISON DE CAUMONT.

J'ai fait remarquer (p. 213, note) que l'on avait inséré dans les anciennes éditions des Mémoires de Mademoiselle une note rédigée par quelque généalogiste sur des failles nobles et entre autres sur la famille de Caumont, à laquelle appartenait Lauzun. On l'a trouvée sans doute avec le manuscrit de ses Mémoires, où elle est placée presque en tête du tome I, folio 17, dans le manuscrit de la Bibliothèque impériale. Cette note n'est pas de la main de Mademoiselle, comme on le croirait d'après les anciennes éditions ; elle a été rédigée pour prouver que les princes étrangers et surtout les princes de la maison de Lorraine n'étaient pas d'aussi ancienne noblesse que beaucoup de gentilshommes français. Voici le texte complet de cette note:

Sans remonter plus loin que le règne de Charles VI qui mourut en 1422, il se prouve par un registre de la chambre des comptes que Charles, duc de Lorraine, qui ne s'étoit pas encore agrandi des dépouilles des évêchés de Metz, Toul et Verdun, et grand oncle de Claude, comte, puis duc de Guise, fut retenu du roi pour commander quatre-vingts hommes d'armes à trois cents livres par mois, pour être à sa suite ou à celle de Louis, duc d'Anjou, régent du royaume.

Sous Charles VII, Antoine de Lorraine, comte de Vaudemont, bisaïeul du duc de Guise, servit avec trente et un hommes d'armes et trente et un archers, et dans le même temps Jean de Lorraine son fils servit simplement en qualité d'écuyer et capitaine de Granville, petite place en Normandie sous le duc d'Alençon, prince du sang.

Les seigneurs de Deuilly et de Gondrecourt et les seigneurs de Florange, de la même maison de Lorraine, n'ont tenu rang seulement que d'écuyers, tandis que, comme il se prouve par le même registre, plusieurs gentilshommes particuliers tenoient autant et plus de rang dans les armées, comme Jean, seigneur de Saint-Py, Hutin, seigneur d'Aumont (d'où les ducs d'Aumont), Bureau, seigneur de La Rivière, Jean, seigneur de Bueil (d'où les comtes de Sancerre), Enguerrand, sire de Coucy, qui avoit épousé Isabelle, fille d'Édouard III, roi d'Angleterre, et qui étoit fils de Catherine d'Autriche, véritable héritière des biens de cette maison, Olivier du Guesclin, frère du connétable, Eude de Melun, ancêtre des princes d'Épinoi, Bertrand de La Tour d'Auvergne, souche des ducs de Bouillon, et le vicomte de Rochechouart, aîné des ducs de Mortemart.

Ce fut en ce temps que plusieurs seigneurs de France, dont les terres étoient frontières des provinces occupées par les Anglois, servoient avec des corps entiers, tels que les sires d'Albret et de Cominges, auteurs des maréchaux d'Albret et de Gramont, Jean Nompar de Caumont, dont on voit des titres de plus de sept cents ans, qui fut seigneur de Lauzun et qui traita avec Jean de Bourbon, général des armées du roi en Guienne, en 1404, pour entrer dans le parti du roi avec ses terres et forteresses, Guillaume de Chaumont, à qui Charles VII, pour ses services contres les Anglois, rendit, en 1422, la comté du même lieu, ancien partage de ses ancêtres, comtes de Vexin, dont un autre Guillaume fut gendre de Philippe I, Charles de Châtillon-sur-Marne, comte de Blois et de Saint-Paul, les seigneurs de Beauvau, sous la bannière desquels la noblesse d'Anjou, jointe au vicomte de Narbonne, au sire de Montenay, au bâtard de Bourbon, à Jean d'Harcourt, à Ambroise de Loré et autres seigneurs, faisoit la guerre aux mêmes Anglois dans les marches du Maine et de Normandie, dont [étoient] Isabeau de Beauvau, comtesse de Vendôme, et les marquis d'Espense, du Rivau et de Beauvau-Rivarennes.

Il seroit trop long de remonter dans les autres temps pour rapporter plusieurs exemples semblables des autres maisons, comme de celles de Montmorency, Laval, Rohan, Sainte-Maure, source des ducs de Montausier, Bethune, souche des ducs de Sully, Apremont, Longueval, Choiseul et plus de soixante autres, dont la postérité subsiste encore, sans le nombre presque infini de celles qui sont éteintes, lesquelles tenoient rang en France, dès l'an 1000, et qui par leurs services avoient bien mérité de l'État pendant plus de cinq cents ans avant que la maison de Lorraine, élevée par la faveur de trois règnes consécutifs, entreprit de se distinguer d'elles, par cette redoutable puissance, qui a pensé être si fatale à la monarchie. »

A la suite de la note se troue la liste suivante des gentilshommes auxquels on a fait allusion :


Albret Choiseul
Apremont Champagne-La Suze
Astarac Châteaubriant
Acigné Châtillon
Anglure Coligny
Arpajon Conflans
Beauvau Clermont en Dauphiné et en Beauvaisis
Bellay Créqui-Blanchefort
Bethune Crusol
Bueil Escars
Boutillier de Senlis Foix-Rabat
Briqueville de La Luzerne Gaucourt
Castellane, jadis Adhémar Harcourt
Caumont Hennin
Chaumont Islemarivaut
Chabot
 
Laval Pons
La Palu-Varambon Polignac
La Rochefoucauld Piennes-Moigneville
La Tour d'Auvergne Rochechouart
La Rœu en Auvergne Rohan
Lusignan, comte des Marais Rieux
Luxembourg Rosemadec
Longueval Roquefeuille
Melun Rouvoi-Saint-Simon
Montesquiou Sainte-Maure
Maillé Simianne
Mailly Talleyrand-Chalais
Montmorin La Trimouille
Montmorency Tournemine
Poitiers-Saint-Valier Turpin


James Eason.