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 p163  Troisième climat, suite

QUATRIÈME SECTION

La présente section comprend la description de Santarîya, celle des déserts qui s'étendent jusqu'au territoire d'Alexandrie, et celle de diverses parties de la haute et de la basse Égypte sur les bords du grand Nil, savoir du Faiyoum, du Rîf et en général des districts de la basse Égypte, dépendants de Miçr. S'il plaît à Dieu, nous décrirons tous ces pays en détail, avec ordre, suite et clarté, ainsi que les monuments et les curiosités de l'Égypte, les objets d'exportation et d'importation, et les mesures de la hauteur des eaux.

Nous disons donc que la distance en ligne directe qui sépare la ville de Barca et celle d'Alexandrie est de 21 journées, et voici comment : De Barca à Caçro 'n-Nadâma, 6 milles ; de là à Tâcanest, 26 milles ; de là à Maghâro 'r-Rakîm, 25 milles ; c'est à Maghâro 'r-Rakîm que la présente voie rejoint la voie supérieure.

 p164  De là à Djobb Halima, 35 milles ; de là à Wâdîº Makhîl, 35 milles ; 137 puis à Djobbo 'l‑Maidân, 35 milles ; ensuite à Djannâdo 'ç-Çaghîr, 35 milles ; de ce lieu à Djobb Abdillah, 30 milles ; de là à Mardjo 's-Chaikh, 30 milles ; enfin à al‑Acaba (Catabathmus), 20 milles.

D'al‑Acaba à Hawânît Abî Halîma, on compte 20 milles ; de là à Kharbato 'l‑Caum, 35 milles ; puis à Caçro 's-Chammâs, 15 milles ; de Caçro 's-Chammâs à Siccato 'l‑Hammâm, 25 milles ; de là à Djobbo 'l‑Ausadj, 30 milles ; puis à Canâiso 'l‑Harîr, (30 milles) ; ensuite à at‑Tâhouna, 24 milles ; d'at-Tâhouna à Hanîyato 'r-Roum, 30 milles ; de ce lieu a Dzâto 'l‑Homâm, 34 milles ; puis à Tsounia, 18 milles ; de là à Alexandrie, 20 milles.

Tel est l'itinéraire qu'on suit en prenant la voie supérieure par le désert ; quant à l'itinéraire du littoral, le voici :

D'Alexandrie au cap dit Râso 'l‑Canâis (Catabathmus parvus), on compte 3 journées de navigation.

De ce cap à Marsâ 't-Tarfâwî, 1 journée.

De là au commencement du golfe dit Djoun Rammâda, 50 milles.

De là à Acabato 's-Sollam (Catabathmus), . . milles.

D'Acabato 's-Sollam à Marsâ Amâra, 10 milles ; de là à al‑Mallâha, 30 milles ; puis à Lacca, 10 milles. De Lacca dépendent deux châteaux construits dans le désert ; l'un d'eux se nomme Kîb, et l'autre Camâr.

 p165  De Locca à Marsâ Tabraca, 50 milles ; de là au port de Râs Tînî, 1 journée et demie de navigation.

De Râs Tînî à al‑Bondarîya (al‑Bondzarîya), 2 journées.

D'al-Bondarîya, où la mer forme une courbure exactement dirigée vers le couchant, au cap dit tarfo 't-Ta'dîya, 2 journées sans habitations ; la côte se compose de montagnes et de ravins où personne ne passe, à cause de l'aspérité et de l'escarpement des sentiers. 138 C'est à partir du cap d'at‑Ta'dîya que commence le golfe de Zadîc (Zarîn). La longueur de ce golfe, qui, passant par al‑Bondarîya, s'étend jusqu'à Alexandrie, est, en ligne directe, de 6 journées de navigation ou de 600 milles ; mais en suivant les contours du golfe, de 11 journées et demie, ou de 1150 milles.

A partir de l'extrémité des dépendances de Tolmaitsa (Ptolemaïs), dont il vient d'être question, commencent les possessions des tribus arabes de Haib (et de Rawâha), qui sont riches et possèdent beaucoup de chameaux et de moutons. Leur pays est sûr et tranquille. Les montagnes d'Autsân sontº très cultivées ; les habitants s'y livrent à l'exercice de la chasse ; le térébinthe, le genévrier et le pin y croissent en quantité ; on y voit beaucoup de champs ensemencés et de dattiers, et l'on y recueille d'excellent miel. La dernière des dépendances des Haib est Locca.

A 10 milles environ d'al-Bondarîya, est un château considérable habité par une famille de la tribu de Lakhm ; le château porte le nom de Caçr Lakhm. Ces hommes s'occupent beaucoup de l'éducation des abeilles et de la récolte du miel, ainsi que de l'extraction du goudron qu'ils obtiennent du genévrier et qu'ils transportent en Égypte.

Quant à Alexandrie, c'est une ville bâtie par Alexandre, qui lui  p166 donna son nom. Elle est située sur les bords de la Méditerranée, et l'on y remarque d'étonnants vestiges et des monuments encore subsistants, qui attestent l'autorité et la puissance de celui qui les éleva, autant que sa prévoyance et son savoir. Cette ville est entourée de fortes murailles et de beaux vergers. Elle est vaste, très peuplée, commerçante et couverte de hauts et nombreux édifices. Ses rues sont larges et ses constructions solides ; les maisons y sont carrelées en marbre, et les voûtes inférieures des édifices soutenues par de fortes colonnes. Ses marchés sont vastes et ses campagnes productives.

Les eaux de la branche occidentale du Nil, qui coule vers cette ville, passent sous les voûtes des maisons, et ces voûtes sont contiguës les unes aux autres ; quant à la ville, elle est bien éclairée et parfaitement construite. 139 On y remarque le phare fameux qui n'a pas son pareil au monde sous le rapport de la structure et sous celui de la solidité ; car, indépendamment de ce qu'il est fait en excellentes pierres de l'espèce dite caddzân, les assises de ces pierres sont scellées les unes contre les autres avec du plomb fondu et les jointures tellement adhérentes, que le tout est indissoluble, bien que les flots de la mer, du côté du nord, frappent continuellement cet édifice. La distance qui sépare le phare de la ville est, par mer, d'un mille, et par terre de 3 milles. Sa hauteur est de 300 coudées de la mesure dite rachâchî, laquelle équivaut à 3 empans, ce qui fait donc 100 brasses de haut, dont 96 jusqu'à la coupole, et 4 pour la hauteur de la coupole. Du sol à la galerie du milieu, on compte exactement 70 brasses ; et de cette galerie au sommet du phare, 26. On y monte par un escalier large, construit dans l'intérieur, comme le sont ordinairement ceux qu'on pratique dans les tours des mosquées. Le premier escalier se termine vers le milieu du phare, et là l'édifice devient, par ses quatre côtés, plus étroit. Dans l'intérieur et sous l'escalier, on a construit des chambres. A partir de la galerie du milieu, le phare s'élève jusqu'à  p167 son sommet, en se rétrécissant de plus en plus, pas au delà cependant qu'un homme n'en puisse toujours faire le tour en montant.

De cette même galerie on monte de nouveau, pour atteindre le sommet, par un escalier de dimensions plus étroites que celles de l'escalier inférieur. Le phare est percé, dans toutes ses parties, de fenêtres destinées à procurer du jour aux personnes qui montent, et afin qu'elles puissent placer convenablement leurs pieds en montant.

Cet édifice est singulièrement remarquable, tant à cause de sa hauteur qu'à cause de sa solidité ; il est très utile en ce qu'on y allume nuit et jour du feu pour servir de signal aux navigateurs durant la saison entière des voyages ; les gens des navires reconnaissent ce feu et se dirigent en conséquence, car il est visible d'une journée maritime (100 milles) de distance. Durant la nuit il apparaît comme une étoile brillante ; durant le jour on en distingue la fumée.

Alexandrie est située à l'extrémité (au fond) d'un golfe et entourée de plaines et de vastes déserts où il n'existe ni montagne ni aucun objet propre à servir de point de reconnaissance. Si ce n'était le feu dont il vient d'être parlé, la majeure partie des vaisseaux qui se dirigent vers ce point s'égareraient dans leur route. 140 On appelle ce feu fanousa, et l'on dit que celui qui construisit le phare fut le même homme qui fit construire les pyramides existantes sur les limites du territoire d'al‑Fostât, à l'occident du Nil ; d'autres assurent que cet édifice est au nombre de ceux qui furent élevés par Alexandre à l'époque de la fondation d'Alexandrie. Dieu seul connaît la vérité du fait.

Auprès de cette ville on voit encore les deux obélisques (aiguilles). Ce sont deux pierres de forme quadrangulaire, et plus minces à leur sommet qu'à leur base. La hauteur de l'un de ces obélisques est de 5 brasses, et la largeur de chacune des faces de la base, de 10 empans, ce qui donne un total de 40 empans de circonférence. On y voit des inscriptions en caractères syriens. L'auteur du Livre des merveilles  p168 rapporte que ces obélisques ont été taillés dans la montagne de Badîm, à l'ouest du pays d'Égypte. On lit sur un d'eux ce qui suit : « Moi, Ya'mor ibn Chaddâd, j'ai bâti cette ville au temps où la décrépitude ne s'était pas encore répandue, où la mort subite n'était pas connue, où des cheveux blancs ne s'étaient pas montrés ; à une époque où les pierres étaient comme de l'argile, où les hommes ne savaient pas ce que c'est qu'un maître. J'ai élevé les colonnes de la ville ; j'ai fait couler ses canaux ; j'ai planté ses arbres ; j'ai voulu surpasser les rois qui y avaient résidé (avant moi), en y faisant construire des monuments admirables. J'ai donc envoyé Tsabout ibn Morra, l'Adite et Micdâm ibno 'l‑Camar ibn abî Righâl, le Tsamoudite, à la montagne rouge de Badîm. Ils en ont extrait deux pierres qu'ils ont apportées ici sur leur dos. Thabout eut une côte brisée, et je prononçai le vœu que je rachèterais sa vie même au prix de celle de tous les hommes de mon empire. Fatan ibn Djâroud, le Montacafite, m'érigea ces pierres, pendant un jour de bonheur. »

Cet obélisque se voit près d'un angle de la ville, du côté de l'orient, l'autre est dans l'intérieur de la ville.

On dit que la salle d'audience de Salomon, fils de David, qu'on voit au midi d'Alexandrie, fut construite par le même Ya'mor ibn Chaddâd. D'autres en attribuent la construction à Salomon. Les colonnes et les arcades de cet édifice subsistent encore de nos jours. Il forme un carré long ; 141 à chaque extrémité sont seize colonnes, et sur les deux  p169 côtés longitudinaux, soixante-sept ; près de l'angle septentrional est une colonne de très grandes dimensions portant un chapiteau et assise sur un entablement en marbre de forme carrée, dont la circonférence est de 80 empans, chaque côté ayant 20 empans de largeur sur 80 de hauteur. La circonférence de cette colonne est de 40 empans et sa hauteur, depuis sa base jusqu'à son chapiteau, est de 9 brasses. Ce chapiteau est sculpté, ciselé avec beaucoup d'art, et fixé d'une manière très solide. Du reste, cette colonne est isolée, et il n'est personne, soit à Alexandrie, soit à Miçr, qui sache pourquoi elle fut mise en sa place isolément. Elle est, de nos jours, très inclinée ; mais, d'après la solidité de sa construction, elle paraît à l'abri du danger de tomber.

Alexandrie fait partie de l'Égypte et c'est l'une des villes capitales de ce pays. Les confins de l'Égypte sont, au sud, la Nubie ; au nord, la Méditerranée ; du côté de la Syrie, le désert de l'Egarement (at‑Tîh) ; à l'est la mer Rouge (mer de Colzom), et à l'occident les oasis (al‑Wâhât).

La longueur du cours du Nil est depuis le rivage de la mer où ce fleuve a son embouchure, jusqu'aux terres de Nubie, situées derrière les oasis, d'environ 25 journées. Des frontières de la Nubie jusqu'à la partie la plus méridionale de ce pays, d'environ 8 journées. De là à l'extrême limite dont nous avons déjà parlé, d'environ 12 journées.

Quant à la ville de Miçr ou d'al-Fostât, elle reçut son nom de Miçrâim, fils de Kham, fils de Noé, qui en fut jadis le fondateur. L'ancienne capitale de l'Égypte était Ain Chams ; mais lorsque, dans les premiers temps de l'islamisme, Amr ibno 'l‑Aci et les musulmans qui l'accompagnaient, vinrent et s'emparèrent de cette ville, ceux‑ci campèrent autour de la tente (fostât) d'Amr et bâtirent des demeures sur l'emplacement de Miçr, c'est-à-dire sur le lieu où est située la Miçr actuelle. On raconte à ce sujet qu'Amr ibno 'l‑Aci s'étant emparé  p170 de Miçr et ayant voulu se rendre à Alexandrie, ordonna que sa tente fût pliée et portée devant lui. Mais une colombe descendit sur le faîte de la tente, et y pondit des œufs. Lorsqu'Amr fut informé de cette circonstance, il ordonna qu'on laissât la tente dressée comme elle l'était, jusqu'à ce que la colombe eût terminé sa ponte ; ce qui fut fait. 142 Par Dieu ! dit‑il, nous ne porterons pas préjudice à celui qui se réfugie auprès de nous et qui se repose avec sécurité à notre côté ; nous nous garderons d'affliger cette colombe par la destruction de ses œufs. Il laissa donc subsister la tente, alla résider à Miçr jusqu'à l'éclosion des œufs, puis il partit.

La ville de Miçr porte, en langue barbare (grecque), le nom de Babylon (Banbalouna). Elle est, de nos jours, très considérable, soit sous le rapport de son étendue et de sa population, soit sous celui de l'abondance de toutes les commodités de la vie et de tout ce qui est beau et bon. Les rues en sont larges, les édifices solides, les marchés bien fournis et bien achalandés, les champs cultivés contigus et renommés par leur fertilité. Quant aux habitants, ils sont éminents par l'élévation de leurs sentiments et de leurs aspirations aussi bien que par leur piété ; ils possèdent de grandes richesses toujours accroissantes et les plus belles marchandises ; ils ne sont ni travaillés par les sollicitudes, ni dévorés par le chagrin, car ils jouissent d'une grande sécurité et d'un calme parfait, l'autorité publique les protégeant et la justice régnant parmi eux. La longueur de cette ville est de 3 parasanges. Le Nil y vient de la partie supérieure de son territoire, passe auprès et au midi de la ville, fait un détour vers l'occident, puis se divise devant Miçr en deux branches, de l'une desquelles on passe par la ville à l'autre. Dans l'île formée par ces deux branches on voit beaucoup d'habitations considérables et d'édifices contigus construits sur les bords du fleuve. Elle s'appelle Dâro 'l‑Mikyâs (maison du nilomètre) ; nous en parlerons ci-après. On y passe au moyen d'un pont qui est supporté par une trentaine de bateaux. L'autre branche est beaucoup plus  p171 large, et on la traverse au moyen d'un pont composé d'un nombre double de bateaux. Ce second pont joint l'île à la rive (occidentale) connue sous le nom d'al-Djîza, où l'on remarque d'élégantes habitations, de hauts édifices, un bazar et des champs cultivés.

Le terrain de Miçr ne se compose pas de terre pure, mais il est marécageux et imprégné de sel. Les maisons et les palais de cette ville sont à plusieurs étages : la plupart ont cinq, six ou même sept étages, et souvent un seul édifice contient cent et même un plus grand nombre d'habitants. Ibn Haucal rapport, dans son ouvrage, qu'à l'époque où il écrivait, il existait dans le lieu appelé al‑Maukif, un palais connu sous le nom de Dâr Abdi 'l‑Azîz, où l'on apportait journellement quatre cents outres d'eau 143 pour la consommation des personnes qui y étaient logées, et dans lequel on comptait cinq chapelles, deux bains et deux fours.

La majeure partie des édifices de Miçr sont construits en briques crues. Les rez-de-chaussée restent ordinairement inhabités. Il y a dans cette ville deux mosquées cathédrales (djâmi) destinées à la réunion des fidèles et à la khotba. L'une d'elles fut bâtie par Amr ibno 'l‑Aci, au milieu de bazars qui l'entourent de toutes parts. C'était autrefois une église romaine ; elle fut convertie en mosquée par ordre d'Amr. L'autre, située au sommet du Maukif, fut construite par Abou 'l‑Abbâs Ahmed ibn Touloun. Ce prince en bâtit une autre dans le quartier dit al‑Kirâfa, habité par de pieux cénobites. Il en existe encore une dans l'île formée par les deux branches du Nil et une cinquième sur la rive occidentale du Nil, au lieu dit al‑Djîza.

Miçr est généralement bien peuplée et ses bazars sont bien fournis de  p172 toutes sortes deº comestibles, de boissons et de beaux habits. Les habitants jouissent d'une grande prospérité et se distinguent par l'élégance et la douceur de leurs manières. La ville est de tous côtés entourée de vergers, de jardins, de plantations de dattiers et de cannes à sucre, arrosés par les eaux du Nil qui fertilisent le pays depuis Syène jusqu'à Alexandrie. L'inondation et le séjour des eaux sur les terres du Rîf ont lieu depuis le commencement des chaleurs jusqu'à l'automne ; alors les eaux s'écoulent ; on ensemence les champs, et l'on n'a plus besoin de les arroser. Il ne tombe en Égypte ni pluie ni neige ; à l'exception du Faiyoum, il n'y a point dans ce pays de ville où l'on voit de l'eau courante qui reste sans emploi.

Le Nil coule, en général, vers le nord, et la largeur des terrains cultivés sur ses rives est, depuis Syène jusqu'à al‑Fostât, entre 1 demi-journée et 1 journée. Au-dessous d'al-Fostât, cet espace s'agrandit, et cette largeur, depuis Alexandrie jusqu'au Hauf, qui s'étend du côté de la mer de Colzom, est d'environ 8 journées. Sur les rives du Nil rien n'est stérile ou désert ; 144 on n'y voit que jardins, vergers, villes, villages, population et commerce. La longueur du fleuve depuis ses sources jusqu'à ses embouchures est, s'il faut en croire divers auteurs, de 5634 milles. D'après l'auteur du Kitâbo 'l‑Khizâna, la longueur de son cours et de 4595 milles. Quant à sa largeur (moyenne), elle est, en Nubie et en Abyssinie, de moins de 3 milles, et en Égypte, de deux tiers d'un mille.  p173 C'est un fleuve auquel nul autre ne peut être comparé.

Quant à l'île située en face de Miçr, dont nous avonsº déjà parlé et où l'on remarque des édifices, des maisons de plaisance et le dâro 'l‑mikyâs (la maison du nilomètre), elle s'étend, en largeur, entre les deux branches du Nil, de l'est à l'ouest, tandis que sa longueur est du sud au nord. La partie supérieure (méridionale), où est situé le nilomètre, est large ; le milieu plus large ; la partie inférieure se termine en pointe. La longueur de cette île, d'une extrémité à l'autre, est de 2 milles, et sa largeur (moyenne), d'un jet de flèche.

Le nilomètre (mikyâs) est situé vers l'extrémité la plus large de l'île, du côté de l'orient, c'est-à-dire du côté d'al-Fostât. C'est un édifice considérable, intérieurement entouré d'arcades soutenues par des colonnes. Au milieu est un bassin vaste et profond où l'on descend par un escalier en limaçon et de marbre, et au milieu duquel on voit une colonne également en marbre, qui porte inscrite une graduation en nombres indiquant des coudées et des doigts. Au-dessus de la colonne est une construction solide en pierres, peinte de diverses couleurs où l'or et l'azur s'entremêlent avec d'autres teintures solides. L'eau parvient à ce bassin au moyen d'un large canal communiquant avec le Nil ; elle ne pénètre cependant pas dans ce bassin à la crue du fleuve ; or, cette crue a lieu au mois d'août. La hauteur nécessaire pour arroser convenablement les terres du Sultan est de 16 coudées ; lorsque les eaux s'élèvent à 18 coudées, l'irrigation s'étend sur toutes les terres qui sont sur les rives du fleuve ; lorsque la crue s'élève à 20 coudées, elle est préjudiciable ; lorsqu'elle n'est que de 12 coudées, elle est à peine suffisante. La coudée équivaut à 24 doigts. Le dommage résultant d'une crue qui excède 18 coudées 145 consiste en ce qu'alors les eaux emportent les arbres et ruinent les demeures. Celui qu'occasionne une crue inférieure à 12 coudées est la sécheresse et par suite la stérilité.

 p174  Au midi d'al-Fostât est le village de Menf (Memphis), et au nord la ville dite Ain Chams ; l'un et l'autre sont peu considérables et situés vis-à-vis le mont d'al‑Mocattam. On dit que c'étaient des lieux de plaisance de Pharaon, sur qui soit la malédiction divine !

Menf est aujourd'hui, en majeure partie, ruinée. Ain Chams subsiste et est habitée. Elle est située au pied de la montagne d'al-Mocattam.º Non loin de là, au sommet du Moccattam,º est un lieu connu sous le nom de Tannour Fir'aun (fournaise de Pharaon). Il y avait un miroir tournant au moyen d'un mécnisme. Lorsque le roi sortait de l'une des deux villes, c'est-à-dire, de Menf ou d'Ain Chams, il faisait monter dans cet endroit un homme qui disposait le miroir de manière que le roi pût toujours voir saº propre image et n'oubliât pas un instant la dignité de ses manières.

Aux environs d'al-Fostât le crocodile n'est point un animal nuisible ; on dit même que, soit qu'il descende de l'Égypte supérieure, soit qu'il remonte le Nil, parvenu à al‑Fostât, il nage, renversé sur son dos, jusqu'à ce qu'il ait dépassé cette ville. On ajoute que c'est l'effet d'un talisman ; c'est ainsi que le crocodile n'est point nuisible du côté de la rivière de Boucîr, tandis que il l'est du côté de la rive d'al-Achmounî, bien qu'il n'y ait entre ces deux lieux que la largeur du fleuve (que les sépare). Rien n'est plus surprenant.

A Ain Chams, du côté d'al-Fostât, croît le balsân, plante dont on extrait le baume. On ne connaît pas au monde d'autre lieu qui produise cette plante. Au-dessous d'al-Fostât est la métairie de Sîrou, très considérable, et où l'on fabrique de l'hydromel très renommé. Au territoire d'al-Fostât touche le Mocattam où sont les tombeaux de divers  p175 prophètes, tels que Joseph, Jacob et les douze patriarches, sur qui soit le salut !

A 6 milles de Miçr, on voit les deux pyramides. Elles furent construites sur un plateau uni, et l'on ne voit dans les environs aucune montagne contenant de la pierre à bâtir. La hauteur de chacune d'elles, à partir du sol, est de 400 coudées, 146 et sa largeur, tout autour, est égale à la hauteur. Le tout est construit avec des blocs de marbre de 5 empans de haut, sur 15 ou 10 de long, plus ou moins, selon que l'architecture l'exige. A mesure que l'édifice s'élève au-dessus du niveau du sol, ses proportions se rétrécissent, en sorte que sa cime offre à peine l'espace nécessaire pour faire reposer un chameau. Celui qui veut se rendre aux pyramides, par terre, passe à al‑Djîza par le pont, puis au village de Dahchour, où est la prison de Joseph (sur qui soit la paix !), 3 milles. De Dahchour on vient aux deux pyramides. La distance qui les sépare l'une de l'autre est d'environ 5 milles, et des pyramides au point le plus voisin de la rive du Nil, on compte 5 milles. Sur les parois de leurs murs, on voit des inscriptions en partie effacées, et dans l'intérieur de chacune d'elles est un chemin où l'on peut passer. Entre les deux pyramides, il existe un chemin assez large creusé sous terre et donnant passage de l'une à l'autre. On dit que ces monuments sont des mausolées de rois, et qu'avant d'être employés à cet usage, ils servaient de grenier à blé.

A l'ouest de Miçr, et à 2 journées de distance de cette ville, est celle d'al-Faiyoum, qui est grande et entourée de vergers, de jardins et de champs cultivés. Elle est bâtie sur les deux rives de la rivière d'al-Lâhoun, dont l'origine est, d'après ce qu'on rapporte, que Joseph dériva à son usage deux canaux destinés à recevoir les eaux au temps de la crue, et à les conserver constamment. Il consolida ces ouvrages au moyen de pierres disposées en couches les unes au-dessus des autres.

Le territoire d'al-Faiyoum est fertile, abondant en fruits, en céréales, et particulièment en riz, qu'on y cultive par préférence aux autres  p176 grains. L'air y est malsain, pernicieux aux voyageurs qui y viennent et aux étrangers qui y fixent leur domicile. On voit à al‑Faiyoum des vestiges de grandes constructions, et son territoire porte le même nom que la ville. Tous ces champs cultivés qui entourent la ville, étaient jadis dans l'enceinte d'un mur qui embrassait toutes les dépendances du Faiyoum et renfermait toutes ses plaines et tous ses lieux habités. 147 Il reste aujourd'hui si peu de chose de ce mur que c'est comme rien.

La rivière d'al-Lâhoun fut creusée et les eaux y furent amenées par Joseph le juste, sur qui soit le salut ! Voici à quelle occasion : Quand Joseph était devenu vieux, le roi désirait lui procurer du repos et le dispenser du soin des affaires. Comme le nombre de ses domestiques et des membres de sa famille et de la famille de son père s'était considérablement accru, il lui donna en fief le Faiyoum, lequel était un marais (lac) où les eaux se déversaient et où croissaient des joncs et des roseaux ; chose qui déplaisait au roi, parce que ce lac était dans son voisinage.

Lorsqu'il en eut fait don à Joseph, celui‑ci se rendit du côté de Çoul, où il fit creuser le canal connu sous le nom d'al-Manhâ, qu'il amena jusqu'à l'emplacement d'al-Lâhoun. Ensuite il construisit al‑Lâhoun, et la consolida au moyen de pierres, de chaux, de briques et de coquillages, ce qui forma comme un haut rempart, au sommet et vers le milieu duquel il fit placer une porte. Derrière, il creusa deux canaux ; le canal oriental entrait dans le Faiyoum, tandis que le canal occidental qu'on appelle Tanhamat, venait rejoindre le premier en passant par le dehors du Faiyoum. L'eau s'écoula du marais par le canal oriental vers le Nil ; quant aux eaux du canal occidental, elles s'écoulèrent dans le désert de Tanhamat (à l'occident) ; ainsi il n'en resta rien absolument. Tout cela eut lieu en peu de jours. Alors Joseph ordonna qu'on se mîtº à l'œuvre. On coupa les roseaux, qui se trouvent là, ainsi que les lianes, les touffes d'arbrisseaux et les tamaris.  p177 On était alors au temps de l'inondation du Nil. Les eaux s'introduisirent dans le canal d'al-Manhâ, et parvinrent à al‑Lâhoun, qu'elles passèrent pour entrer dans le canal du Faiyoum. De là elles se répandirent sur tout le pays et en couvrirent la surface, en sorte qu'elle devint comme une mer. Tout ce travail fut fait en 70 jours ; et lorsqu'il fut terminé, le roi dit, en le considérant : voilà un ouvrage de mille jours (alfi yaum). C'est de là que vient le nom d'al-Faiyoum. Ensuite Joseph dit au roi : le bien public exige que tu me confies une famille par chaque district de l'Égypte. Le roi y ayant consenti, Joseph ordonna que l'on bâtît un village pour chacune de ces familles. Il y avait 85 familles ; il y eut donc autant de villages. 148 Lorsque les constructions furent achevées, Joseph assigna à chaque village une quantité d'eau suffisante pour arroser les terres, mais rien au-delà ; puis il assigna à chaque famille l'eau nécessaire pour sa boisson durant la temps même de la retraite des eaux. Telle est la description du Faiyoum.

Quand on part de Miçr pour se rendre, en remontant le Nil, dans l'Égypte supérieure, on va d'al-Fostât à Monyat's-Soudân, hameau considérable, entouré de champs ensemencés de diverses espèces de céréales, sur la rive occidentale du Nil, et environ à 15 milles de Miçr.

De là à Baiyâdh, qui comprend plusieurs hameaux et métairies, entourés de champs cultivés très fertiles et de jardins produisant toute sorte de fruits, 20 milles.

De là à al‑Himâ aç-Çaghîr, 20 milles ; puis à al‑Himâ al‑Kabîr, village peuplé, situé sur la rive orientale, et dont le territoire est cultivé en vergers, en vignes et en cannes à sucre, 10 milles.

De là à Dairo 'l‑Faiyoum, sur la rive orientale, 20 milles ; puis au village de Tounis (Younos), sur la rive occidentale, mais à quelque distance du fleuve, 2 milles. De là à Dahrout, sur la rive occidentale, 1 demi-journée. De Dahrout à al‑Cais, sur la rive occidentale,  p178 environ 20 milles.

Al‑Cais est une ville très ancienne dont nous avons parlé dans la partie de la description de l'Égypte contenue dans le second climat. Nous avons donné de même l'itinéraire de cette ville le long du Nil à Syène (Oswân) ; il est donc inutile de revenir là-dessus.

Quant aux pays situés au-dessous de Miçr, celui qui veut s'y rendre en descendant le Nil doit passer d'abord par al‑Monya, 5 milles.

Puis par al‑Câid, ville considérable et très peuplée, 5 milles. Le territoire de cette ville est couvert de champs cultivés, de vergers, de pâturages et de plantations de cannes à sucre.

Puis par Chobra, gros bourg où l'on fabrique de l'hydromel aromatisé qui est très renommé, 5 milles. C'est dans ce lieu qu'on voit l'église (hutte) de Bachons. Puis par Baisous, joli village, 5 milles ; puis par al‑Kharacânia, village florissant, 149 entouré de champs cultivés, de métairies et de plusieurs jardins qui appartiennent au prince, 5 milles.

Puis par le village de Sarout (Saroudas), 5 milles ; puis par Chalacân, gros village florissant, 5 milles ; enfin par le village de Zofaita, 15 milles. A Zofaita se rassemblent tous les navires destinés à la pêche du gros poisson, ce village étant situé à l'extrémité de l'île où le Nil se partage en branches. A peu de distance est la ville de Chatnouf,  p179 au sommet de la branche qui descend à Tennis et à Damiette. C'est un peu au-dessus de Chatnouf que le Nil se partage en deux branches dont les eaux descendent vers l'Égypte inférieure et se déchargent dans la mer, chacune après avoir donné naissance à deux canaux, qui se dirigent également vers la mer.

L'un de ces grands bras, dont le point de partage est auprès de Chatnouf, court du côté de l'orient et parvient à Tennis. De ce bras dérivent trois canaux. L'un d'eux part d'Antouhî, sur la rive occidentale et, après avoir décrit une courbe, revient à la branche principale devant Damsîs. Plus bas, du côté de l'occident, commence un autre canal, qui coule vers Damiette.

Quant à l'autre branche, elle se dirige, à partir du point de division près de Chatnouf, vers l'occident, jusqu'auprès de Fîs Anmâr où en dérive un canal qui coule vers l'occident ; puis elle tourne son cours vers le village de Babidj, au-dessous duquel commence le canal qui parvient à Alexandrie, et qui porte le nom de canal de Châbour. L'eau n'y coule pas durant toute l'année, mais seulement durant le temps de l'inondation du Nil. 150 Lorsque les eaux de ce fleuve ont baissé, le canal reste à sec et n'est plus navigable. De cette grande branche qui se dirige vers Rosette (Rachîd), se détache un bras qui commence au-dessous de Sindayoun (Sindioun), de Samdîsâ et de Fouah (Fouwah) et au-dessus de Rosette. Il va se décharger dans un lac qui s'étend le long du rivage de la mer, vers l'occident, jusqu'à 6 milles environ d'Alexandrie, en sorte que les marchandises apportées par les navires (du lac) sont transportées par terre à Alexandrie.

Sur ces divers canaux, on voit de toutes parts des villes très peuplées et des villages florissants. Nous en décrirons la majeure partie, s'il plaît à Dieu.

 p180  Celui qui veut se rendre de Miçr à Tennis, a 9 journées de chemin à faire ; de Tennis à Damiette, on compte 1 journée de navigation ; de Damiette à Rosette, 2 journées ; de Rosette à Alexandrie 1 journée de navigation ; d'Alexandrie à Miçr, 6 journées.

De Miçr on se rend à Zofaita, dont nous avons déjà parlé comme d'un lieu où se rassemblent les navires destinés à la pêche. Ces navires sont ordinairement au nombre de cent. La distance entre Miçr et Zofaita est de plus de 50 milles.

Vis-à-vis de Zofaita, sur la rive gauche, est Chatnouf, jolie ville. De là à Chinwân, on compte 25 milles ; car on descend à as‑Châmiîn, village situé sur la rive orientale du fleuve, et dans le territoire duquel on cultive beaucoup de cannes à sucre, d'oignons et de concombres, 10 milles ; vis-à-vis, et sur la rive occidentale, est Tant, joli village dont les environs sont très productifs en céréales ; de Tant à Chinwân, jolie petite ville, on compte 15 milles.

De là en descendant à Cochairato al‑Abrâdj, environ 12 milles. Ce dernier village qui est très florissant et dont le territoire est bien cultivé, est situé vis-à-vis de Chioudja. De là, toujours en descendant, 151 à aç-Çâlihîya, environ 10 milles.

Aç-Çâlihîya est une ville populeuse, dont le territoire est bien cultivéº mais les habitants sont voleurs, méchants et connus par leurs mauvaises mœurs.

Au-dessous d'aç-Çâlihîya, sur la rive gauche, est Monyato 'l‑Ataf, village florissant, situé à une distance de 10 milles de Chioudja.

Puis on descend à Dadjwa (Dodjwa), petite ville très peuplée où le commerce et l'agriculture sont dans un état florissant, 15 milles.  p181 On voit à Dadjwa beaucoup de navires spécialement destinés au passage des troupes.

Puis on descend à Monyato 'l‑Attâr, petit village entouré de vergers et de jardins, 20 milles. Vis-à-vis de ce lieu, sur la rive gauche, est Antouhî, petite ville entourée également de vergers, de jardins et de champs ensemencés, et où se tient un marché à jour fixe.

De Monyato 'l‑Ataf, dont il vient d'être question, à Chomairac, village situé sur la rive gauche, vis-à-vis, mais un peu au-dessous de Dadjwa, 10 milles.

Du village de Chomairac à Antouhî, ci-dessus indiqué, environ 10 milles.

Au-dessous d'Antouhî la branche du Nil se subdivise en deux bras, dont l'un se dirige vers l'occident et l'autre vers l'orient ; ils forment une île, se joignent auprès de Chobra et de Damsîs, coulent ensemble durant un court intervalle, puis se subdivisent de nouveau en deux branches dont l'une, l'orientale, se dirige vers Tennis, et l'autre, l'occidentale vers Damiette.

152 Revenons à Antouhî où le Nil se divise. Celui qui veut descendre par le bras oriental passe d'abord à Monyato 'l‑Attâr, village situé vis-à-vis  p182 d'Antouhî, puis à Monyato 'l‑Asl (Bannato 'l‑Asl), hameau considérable dont le territoire produit beaucoup de fruits et est bien cultivé, et vis-à-vis duquel, sur la rive occidentale, est située la grande métairie qui a reçu son nom de Banna (Banha) ; de là on se rend à Atrîb, village où il y a un marché fréquenté, situé sur la rive orientale ; puis à Djandjar, village dont le territoire est très fertile en céréales, et vis-à-vis duquel se trouve sur la rive occidentale Monyato 'l‑Haufî (al‑Haufain), village considérable ; puis à Sanît, lieu situé sur la rive orientale vis-à-vis de Waroura, village très peuplé, entouré de bons pâturages, et où se trouve un joli bazar ; de là au village d'al-Hammârîya vis-à-vis de Monyato 'l‑Haroun, sur la rive occidentale, d'où l'on descend à Çahracht le Grand, village sur la rive orientale, puis a Çahracht le Petit, sur la rive occidentale ; ce dernier lieu est un village florissant où l'on cultive avec succès diverses plantes et notamment le sésame et le chanvre ; de là on se rend à Monyat Ghamr, village sur la rive orientale, où est un marché ; il s'y fait constamment un grand commerce d'importation et d'exportation. Sur la rive opposée est Monyat Zifta ; de là, en suivant la rive occidentale, on descend à Monyato 'l‑Fîrân, village où l'on cultive le cumin, l'oignon et l'ail nécessaires pour les besoins du palais du prince. 153 Vis-à-vis de ce lieu, sur la rive orientale, est Dacadcous (Dacadous), village très considérable, entouré de jardins et de champs cultivés, et où se tient une foire tous les mercredis. De là on descend à Monyat Fîmâs, joli village dont le territoire est très fertile, en face duquel, sur la rive occidentale, est situé Hânout, village entouré de champs ensemencés de lin et bien arrosés par des eaux courantes ; la culture du lin y est couronnée du  p183 plus beau succès et forme l'unique ressource des habitants. De là à Monyat Ichnâ, joli village sur la rive orientale du bras, où il se tient un marché à jour fixe ; puis à Damsîs, dont il a été déjà fait mention. Damsîs est un village très peuplé et florissant ; il s'y tient tous les samedis une foire très fréquentée par les marchands et les chalands, où l'on vend et achète des étoffes et des marchandises de toute espèce.

Celui qui se propose de descendre par le bras occidental va d'Antouhî, à Malîdj, ville commerçante, florissante, située vis-à-vis de Monyat Abdi 'l‑Malik, village grand et riche sur la rive orientale, dont le territoire est très productif, 20 milles.

De Malîdj à Tanta (Tantana), petite ville très peuplée, située sur la rive occidentale, où il y a un bazar et dont les habitants vivent dans un état paisible et prospère, 15 milles.

De Tanta (Tantana) à la ville de Taltî sur la rive occidentale, vis-à-vis d'al‑Dja'farîya, village entouré de champs cultivés, sur la rive droite, 15 milles.

De la ville de Taltî au village de Bolous, sur la rive occidentale, vis-à-vis d'as-Santa, village considérable et florissant.

Du village de Bolous à Sonbât, ville dont les habitants cultivent le lin, se livrent au commerce et sont fort riches, et qui est située sur la rive gauche du Nil, vis-à-vis de la ville de Wan'âcir (Wancâcir).

154 De Sonbât on se rend à Chobra, ville située à l'embouchure du canal qui fait face à Damsîs dont nous avons fait mention ci-dessus.

Celui qui veut se rendre de Damsîs à Tennis par le Nil, descend d'abord jusqu'à Monyat Bedr, environ 2 milles. C'est de là que part, du côté oriental, le canal de Chancha, qui passe auprès de la ville de ce nom, ville très agréable dont les environs sont bien cultivés et  p184 plantés d'arbres et de cannes à sucre, pour lesquelles on y trouve des pressoirs.

De Chancha on vient toujours en descendant le canal à la ville d'al-Bouhat située sur la rive orientale, 24 milles. C'est une ville florissante, possédant des bazars et d'autres ressources et ceinte d'anciennes murailles en pierre.

De là à Safnâs, petite ville bien peuplée, 18 milles.

De là en se dirigeant par terre vers l'occident à Tanâh, ville située sur la rive orientale du canal de Tennis, 25 milles.

De là au lac d'az-Zâr, situé dans le voisinage d'al-Faramâ. Ce lac fait partie du lac de Tennis et n'est séparé de la mer que par un intervalle de 3 milles. Il est très vaste, et, indépendamment de la ville de Tennis, on y remarque l'île de Hiçno 'l‑Mâ, située vis-à-vis et non loin d'al-Faramâ. C'est jusque‑là que parvint le roi Baudoin, qui conquit la Syrie à une époque postérieure à l'hégire ; et ayant couru le risque d'y rester submergé avec son cheval, il revint sur ses pas.

A l'est de Tennis, en tirant tant soit peu vers le sud, et dans le lac de ce nom, est l'île de Touna ; au midi de Tennis est l'île de Nablîya.

Sur la rive occidentale du canal de Chancha dont nous venons de parler, il existe un grand nombre de villages et de hameaux, rapprochés les uns des autres par des routes frayées et produisant toute sorte de denrées utiles.

Celui qui veut aller de Damsîs à Tennis par le bras principal, passe d'abord à Monyat Bedr, dont il a été question ci-dessus ; puis il se rend à Bannâ, lieu situé sur la rive occidentale à 10 milles de Monyat Bedr. Bannâ est un joli village, entouré de jardins et de champs cultivés très productifs, 155 au-dessus duquel le Nil se partage en deux branches qui forment une petite île, à l'occident de laquelle est le bourg florissant de Boucîr ; de l'autre côté, c'est-à-dire sur la branche orientale,  p185 est Rahl Djarrâh, ville petite, mais florissante et commerçante, avec beaucoup de ressources. Entre Rahl Djarrâh et l'embouchure du canal de Chanchâ, on compte 40 milles, et autant entre Boucîr et Bannâ.

De Monyat Ibn Djarrâh (= Rahl Djarrâh), située sur la rive orientale, à Samannoud, située sur la rive opposée, 12 milles. Samannoud est une ville jolie, riche, peuplée, fréquentée par les voyageurs et où l'on trouve à bon marché tout ce qui est nécessaire à la vie.

De Samannoud, en se dirigeant par terre vers l'occident, à Sandafâ, ville située sur les bords du canal de Bolkîna, 8 milles.

De Samannoud à at‑Tsa'bânîya, ville florissante et commerçante, située sur la rive occidentale du canal, 18 milles.

De là à Monyat Assâs, village dont le territoire est très fertile, 12 milles.

De là on descend à Djaudjar, vis-à-vis de Wancho 'l‑Hadjar, petite ville entourée de vergers, située sur la rive orientale, 12 milles. De Wancho 'l‑Hadjar à Samannoud, dont nous venons de parler, la distance est de 36 milles.

De Wancho 'l‑Hadjar en descendant à la ville de Tarkhâ, 12 milles. Cette dernière ville est située sur la rive occidentale du Nil, à 12 milles de Djaudjar. C'est au-dessous de Tarkhâ que le Nil se partage en deux branches dont l'une, l'orientale, se dirige vers le lac de Tennis, et l'autre, l'occidentale, vers Damiette. Celui qui, de Tarkhâ, veut descendre à Tennis passe d'abord à Monyat Chahâr, ville petite, mais florissante et dont les habitants se livrent au commerce et sont riches, située vis-à-vis de Mahallat Damîna, village situé sur la rive orientale, à 5 milles au-dessous de la ville de Chahâr.

De Mahallat Damîna à Cobâbo 'l‑Bâziyâr, village considérable, 12 milles.

 p186  156 De là en descendant à Cobâbo 'l‑Arîf, 16 milles.

De là au village de Damou, 15 milles.

De Damou à Tamâkh, belle ville populeuse et commerçante, sur la rive orientale, 2 milles.

De là à Chamous, village bien peuplé, 10 milles.

De là à Caryato 'l‑Ançâr sur la rive occidentale, 20 milles.

De là au village de Wabîda sur la rive orientale, 20 milles.

De là à Baranbalîn sur la rive occidentale, 20 milles.

Puis à Sabsa, 40 milles. Enfin au lac de Tennis vers l'occident, 15 milles.

Les eaux de ce lac sont douces en été lors de l'inondation du Nil. En hiver et jusqu'à la saison des chaleurs, les eaux de la mer prennent le dessus et communiquent à celles du lac leur salure. Il y existe des villes entourées d'eau et semblables à des îles, telles que Nablî, Touna, Samannât, Hiçno 'l‑Mâ, et on ne peut y aborder qu'au moyen de barques. On fabrique à Tennis, ainsi qu'à Damiette, des étoffes fines de l'espèce dite dabîkî, des choroub et des manteaux (holal) Tennisiens en diverses couleurs. Rien n'égale ces étoffes qui sont tellement belles et précieuses, qu'un seul manteau, lorsqu'il est broché en or, vaut quelquefois mille dénares, et sans or, cent ou deux cents environ. La matière principale de ces étoffes est le lin. Quant à celles qu'on fabrique à Chatâ, à Dabcou (Dabîc), à Damîra et dans les autres îles du voisinage, elles sont sans doute très fines, mais elles n'approchent pas de celles de Tennis et de Damiette.

On raconte que là où est actuellement le lac se trouvent jadis les deux jardins dont il est fait mention dans le livre (de Dieu). Ces jardins appartenaient à deux hommes de la postérité d'Atrîb fils de Miçr,  p187 dont l'un était un homme pieux, l'autre un mécréant ingrat. Comme ce dernier se vantait du grand nombre de ses possessions et de ses enfants, son frére lui dit : je ne vois pas que tu rends grâce à Dieu pour tout ce qu'il t'a donné. 157 Le mécréant (enragé de cet avertissement) prit à son frère tout ce qu'il possédait, on dit même qu'il pronça contre lui une imprécation. Alors Dieu noya dans la mer tout ce qu'il avait, dans une seule nuit, sans qu'il en restât la moindre trace.

Ce lac a peu de profondeur. On le traverse (presque partout) sur des bacs. On y rencontre (quelquefois) deux bâtiments s'éloignant l'un de l'autre, voguant en sens contraire à pleines voiles par le même vent, et se croisant avec une égale vitesse.

Quant à Damiette, c'est une ville bâtie sur les bords et à une certain distance de la mer. On y fabrique des étoffes admirables de l'espèce dite dabîkî et d'autres qui, pour la perfection du travail, approchent de celles de Tennis. Le bras du Nil sur lequel Damiette est située est dérivé de celui qui descend à la ville de Tennis, et son point de départ est au-dessous de Tarkhâ dont nous avons déjà parlé. Celui qui, partant de Miçr, désire s'y rendre, passe par les villes, bourgs et lieux habités dont nous avons donné l'énumération, jusqu'à ce qu'il soit parvenu à Tarkhâ. Prenant ensuite la branche occidentale du Nil qui couleº à Damiette, il parcourt, en descendant, 10 milles jusqu'à Damîra, petite ville située sur la rive occidentale du canal, où l'on fabrique de belles étoffes destinées à l'exportation, et où il se fait beaucoup de commerce ; de Damîra, en descendant le canal, à Chirincâs, ville petite, belle et florissante dont les habitants se livrent à l'industrie et à l'agriculture, située sur la rive occidentale, 17 milles.

De là à Charimsâh, petite ville florissante où il se fait un commerce très actif, 20 milles.

De là à Monyato 'l‑Olouc, village bien peuplé, où l'on trouve des pressoirs à sucre et des productions de la terre en abondance et qui  p188 est situé sur la rive orientale du canal, 20 milles.

De là à Fârescour, village situé sur la même rive, 10 milles.

De Fârescour à Boura, gros bourg dont le territoire est très productif, 15 milles. Et de Boura à Damiette, 13 milles.

158 Ce qui fait pour la distance totale de Tarkhâ à Damiette, 105 milles.

De Tarkhâ à Damsîs, on compte 110 milles.

De Damsîs à Antouhî, environ 90 milles.

De l'embouchure d'Antouhî à Chatnouf, 100 milles.

Et de Chatnouf à al‑Fostât, 50 milles.

Mais pour revenir au canal d'al-Mahalla, nous disons que son point de départ est au-dessous de Tantâ et qu'il coule vers l'occident jusqu'auprès de Charimsâh, située sur le canal de Damiette.

Du point de départ de ce canal à Monyat Ghazâl, village très agréable et offrant beaucoup de ressources, situé sur la rive orientale, on compte 20 milles.

Vis-à-vis de Monyat Ghazâl, sur la rive occidentale, est Mahallat Abî 'l‑Haitsam. De là à l'embouchure du canal de Bolkîna, village dont le territoire est couvert de jardins et de champs cultivés, 15 milles.

Outre ce canal de Bolkîna il y en a un autre qui dérive du canal d'al-Mahalla et qui coule directement à l'ouest vers Çakhâ, en passant successivement par Dâro 'l‑Bacar, village sur la rive occidentale, puis par al‑Mo'tamidîya, sur la même rive, ensuite par Matboul, village florissant, où se tient un marché à jour fixe, situé sur la rive occidentale ; de là à Çakhâ. Çakhâ est dans les terres, et c'est un chef-lieu de district. De là, en se dirigeant vers le midi, on va par terre à Mahallat Çort, puis à Manoufo 'l‑Alyâ, village dont le territoire est fertile  p189 et les dépendances bien peuplées ; puis à Sacâf, village joli, riche, très peuplé et dont les environs sont bien cultivés ; puis enfin à Chatnouf.

Reprenons notre itinéraire à l'embouchure du canal de Bolkîna dont nous venons de parler. De là on descend à al‑Mahalla, grande ville où sont des marchés bien fournis, et où il se fait constamment des affaires de commerce.

A 45 milles, par terre, d'al-Mahalla on trouve la ville de Çanhour (Sanhour) où aboutit le canal de Bolkîna. Cette ville a vis-à-vis d'elle, à l'orient et à 1 mille et demi de distance, celle de Sandafa, ville considérable, jolie et riche en fruits et toute sorte de bonnes choses. 159 Sandafa est située à 15 milles de distance, par terre, de la ville de Samannoud, qui est sur le canal de Tennis et de Damiette.

De Sandafa on se rend à la ville d'al-Mahalla ; de là à Mahallato 'd-Dâkhil, joli village entouré de vergers et de jardins et situé sur la rive occidentale du canal ; de là à Damîra où l'on teint les étoffes dites choroub ; cette ville se compose proprement de deux villes, toutes les deux grandes et contenant plusieurs fabriques d'étoffes, tant particulières que publiques ; de Damîra on se rend à Damiette.

Nous venons de décrire d'une manière suffisante les canaux orientaux du Nil, ainsi que leurs ramifications. Il nous reste à traiter convenablement des canaux occidentaux, de leurs ramifications et de l'état des lieux situés sur leurs rives.

Nous disons donc que le voyageur qui désire descendre de Miçr à Alexandrie, passe d'abord devant l'île d'Ancâch et devant Embâba,  p190 deux villes situées entre les deux rives du Nil, et où l'on avait coutume d'apprivoiser les bêtes sauvages à l'époque de la domination de l'Emir (Ahmed ibn Toulon ?), prince de l'Égypte, 10 milles.

Puis à al‑Akhçâç, joli village dont le territoire est couvert de vergers, de jardins et de maisons de plaisance, 20 milles.

De là en descendant le Nil à Dzarawa, 5 milles.

De là à Chatnouf, petite ville bien peuplée dont le territoire est couvert de champs cultivés et de pâturages, et qui est située vis-à-vis d'Om Dînâr, joli bourg sur la rive occidentale, 20 milles.

D'Om Dînâr à Achmon (Achmoun) Djoraich, petite ville entourée de champs cultivés, de vergers et de jardins, sur la même rive, 15 milles.

De là à al‑Djoraich sur la rive orientale, 18 milles. Cette dernière ville, chef-lieu d'un beau et vaste district, est jolie, commerçante, et 160 entourée de vignobles et de vergers.

De là à Rimâlo 'ç-Çonaim (sables de la petite colonne). Par la permission du Très-Haut, il s'opère en ce lieu un prodige consistant en ce que, si l'on enterre un os dans le sable, au bout de sept jours il se convertit en une pierre très dure.

De Rimâlo 'ç-Çonaim on se rend à Abou Yohannes, gros village florissant, possédant un bazar et entouré de vergers et de plantations ; de là à Tarnout, petite ville bien peuplée où il se fait beaucoup de commerce qui enrichit les habitants ; et de Tarnout à Chatnouf, 50 milles. Auprès de Tarnout est une mine de sel natron d'une excellente qualité ; on en expédie dans tous les pays.

 p191  Tarnout est située sur le canal de Châbour ; en effet lorsque ce bras du Nil est parvenu à Rimâlo 'ç-Çonaim, il se subdivise en deux canaux, dont l'un, l'occidental, passe à Tarnout, à Bistâma, a Tarnout, à Châbour, gros bourg, à Mahallato 's-Saiyida, à Danchâl, à Cartasâ, à Souc Abîº Minâ, à Caranfîl, à al‑Kiryaun, au village d'aç-Çabr, et enfin à Alexandrie.

Ce canal n'est rempli d'eau et on n'y peut naviguer qu'à l'époque de la crue du Nil, attendu que son niveau à l'embouchure est plus élevé que celui des basses eaux du fleuve. Ce canal, lorsqu'il est parvenu à Tarnout, forme une courbure et se dirige vers l'orient au point de coïncider avec l'autre auprès de Babidj (Babîdj), et de manière à former l'île de Bayâr (Abyâr). Quant au point de départ du canal oriental, il est auprès de Rimâlo 'ç-Çonaim. Ce canal se dirige vers le nord, et va rejoindre l'autre auprès de Babidj. Dès son origine, on trouve sur la rive orientale des champs cultivés et de nombreux villages qui se succèdent sans interruption jusqu'auprès de Manouf as‑Soflâ. De là le canal passe le village de Tsanâ (Tandatsa), puis Faicha (Faichat Banî Solaim), 161 puis al‑Badâria (al‑Bondâria), lieu situé en face du phare de Babidj, sur la rive occidentale ; c'est là que les deux canaux se réunissent et n'en forment plus qu'un. Au-dessus de Babidj est un village dit Colaibo 'l‑Ommâl. Le Nil descend ensuite vers le nord jusqu'à Çâ (Saïs), situé sur la rive orientale, vis-à-vis de Mahallat Chaclâ sur la rive occidentale, 15 milles.

De Çâ à Içtâfia, joli village bien peuplé, sur la rive orientale, 20 milles.

 p192  De là à Mahallato 'l‑Alawî, gros village entouré de jardins et de métairies, situé vis-à-vis de Soranbâ, autre village joli et florissant sur la rive occidentale, 15 milles.

De Mahallato 'l‑Alawî à Fouwa, 15 milles.

Fouwâ (Foua) est une jolie ville dont le territoire produit beaucoup de fruits et offre d'excellents pâturages ; il y a un marché, et c'est un lieu de commerce. Vis-à-vis de cette ville le Nil se divise en deux branches de manière à former l'île dite d'ar-Râhib, à l'extrémité de laquelle est située Sandioun, qui fut jadis une ville, mais qui est aujourd'hui ruinée, et dont il ne subsiste que les vestiges et divers villages contigus. De Fouwa à Sandioun sur la rive orientale, on compte environ 15 milles. Sur la rive opposée est le bourg de Samdîsâ distant de Soranbâ de 15 milles. Un peu au-dessus de Samdîsâ, dérive un bras du Nil peu considérable qui se décharge dans le lac Mâra (Mareotis), situé au nord-ouest et dont l'étendue est à peu près de 40 milles de long sur 2 milles de large. Ce lac a peu de profondeur jusqu'auprès du rivage de la mer dont il suit les contours. A une distance de 6 milles de Rosette, il se rétrécit de manière à former une embouchure dont la plus grande largeur est de dix brasses sur une longueur d'un jet de flèche, et par laquelle ce lac communique avec un autre qui a 20 milles de long et une largeur moindre que celle du premier. Les eaux n'en sont point profondes, cependant il est navigable jusqu'à son extrémité. De ce point à Alexandrie, on compte 6 milles. Les voyageurs quittent ici les navires et continuent leur route par terre et à cheval jusqu'à Alexandrie.

Quant à la descente à Rosette par le grand bras du Nil, en voici l'itinéraire : 162 de Samdîsâ au village d'al-Hâfir situé vis-à-vis de Natoubis ar‑Rommân, village sur la rive orientale, 20 milles.

 p193  d'al-Hâfir à al‑Hadîdîya, village florissant, 15 milles. Et de là à Rosette (Rachîd).

Cette dernière ville est bien peuplée. Il y a des marchés, du commerce, de l'industrie. La campagne qui l'environne produit du blé, de l'orge, toute sorte de légumes, des dattes et des fruits en abondance ; on y trouve en quantité du poisson de mer et du poisson du Nil : on y pêche la telline (dalînas), on la sale, on la transporte au loin, et c'est un objet de commerce.

La plupart des bourgs et des villages de l'Égypte sont dans le Hauf et dans le Rîf. Le Rîf est la contrée située au midi du Nil. La majeure partie des habitants de ces villages sont des Coptes chrétiens et jacobites. Ils possèdent un grand nombre d'églises. C'est un peuple inoffensif et qui vit dans l'abondance de tous biens. Ibn Haucal rapporte, dans son ouvrage, que les femmes de distinction parmi les Coptes accouchent assez souvent de deux ou de trois enfants à la fois, et qu'on ne peut attribuer une telle fécondité qu'à l'influence de l'eau du Nil.

De Rosette à Alexandrie, on compte 60 milles, savoir :

De Rosette à ar‑Rimâl (les sables) et à Boukîr, 30 milles.

De là à al‑Caçrain et à Alexandrie, 30 milles.

On pêche à Alexandrie une espèce de poisson rayé dont le goût est agréable, et qui s'appelle al‑Arous. Celui qui mange de ce poisson cuit ou rôti, sans prendre en même temps du vin ou beaucoup de miel, est tourmenté par des rêves impurs.

Nous avons donné l'itinéraire de Miçr à Syène et la Haute-Égypte. Nous avons également décrit la route de Miçr à Ifrikîya. Notre intention est maintenant d'indiquer, station par station, le chemin qui conduit de Miçr à Sidjilmâsa par al‑Bahnasâ, et qui fut suivi par les Almoravides, en 530 de l'hégire.

 p194  De Miçr à al‑Bahnasâ, on compte 7 journées.

D'al-Bahnasâ à Djobb Manâd, 1 journée.

163 Puis à Faidala (Fandala), 1 journée.

Puis 2 journées sans eau.

A la fontaine de Cais (Ain Cais), 1 journée.

A Ghaiyât, 1 journée.

A la montagne d'Amtalâs, 1 journée.

A Nasnât (Casnât), 1 journée.

A Wâdî Castara, 1 journée.

A la montagne de Sarwây, 1 journée.

Au désert de Tîdît, 5 journées sans eau.

A l'étang de Chanâwa, dont l'eau est potable, 1 journée.

Au mont Tâtî, 1 journée.

A Sâmila, 1 journée.

A Sîrou, dans la montagne, 1 journée.

Au désert d'Amtalâwat,6 journées sans eau.

A Nigâw, 1 journée.

A Saloubân, montagne, 1 journée.

Au mont Waddjâd, 1 journée.

A Nadrama. Puis au mont Guezzoul, 1 journée.

Au mont Aidemmor, 3 journées de désert sans eau.

A Solcâya, 2 journées.

A Tâmmamt, 1 journée.

A Sidjilmâsa, 1 journée.

Ce chemin est rarement fréquenté. Les Almoravides, pour le parcourir, prirent des guides.

De Miçr à Bagdâd, on compte 570 parasanges, ce qui équivaut à 1710 milles.

Pour aller de Miçr à Yatsrib (Médine), on passe par les lieux suivants : al‑Djobb (Birca), al‑Bowaib, Manzil Ibn Çadaca (al‑Dâro 'l‑Hamrâ), Adjaroud, ad‑Dowaina (ad‑Dowaitsa), al‑Corsî, al‑Hafar, et après avoir  p195 fait encore une halte, on arrive à Aila. Après avoir quitté Aila on passe par Hacl, Madyan, al‑A'dâ (al‑A'râ), puis par une station sans nom, al‑Calâya, Schi'b, al‑Baidhâ, Wâdî 'l‑Corâ, ar‑Rohaiba, 164 Dzou 'l‑Marwa, as‑Sowaidâ, Dzou Khochob, et de là à Médine-Yatsrib.

Il existe une autre route qui suit les bords de la mer de Colzom, savoir : de Miçr à Ain Chams, à al‑Matarîya, Bircato 'l‑Djobb, petit lac où se déchargent les eaux du canal du Caire, Djobb Adjaroud, Djobbo 'l‑Adjouz (Adjoun), al‑Colzom, Batn Moghîra, port auprès duquel il existe un petit lac, le golfe de Fârân, Madîd, Tîrân, lieu dangereux où se perdent souvent les navires durant la tempête ; en effet, c'est une baie qu'une haute montagne domine ; lorsque le vent vient à souffler de ce côté, il s'engouffre, descend vers la mer, soulève les ondes et fait périr tous les navires qui s'y trouvent ; lorsque c'est le vent du midi qui souffle, il n'y a aucun moyen d'en sortir. Cette baie dangereuse comprend un espace d'environ 6 milles ; on dit que c'est là que Pharaon (sur qui soit la malédiction divine !) fut submergé. Auprès de Fârân il existe également un endroit difficile à traverser lorsque le vent souffle de l'est à l'ouest ou de l'ouest à l'est. Cet endroit s'appelle Djobailân.

 p196  De Djobailân on se rend au mont Sinaï (Djabalo 't-Tour), à Aila, à al‑Hacl, à Madyan, à al‑Haruâ, à al‑Djâr, à Khodaid (Codaid), à Osfân, à Batn Marr et à la Mecque.

L'itinéraire de Miçr à al‑Faramâ est comme il suit : De Miçr à Bilbais, 1 journée ; de là à Fâcous, 1 journée ; de là à Djordjîr, 1 journée. Nous parlerons ci-après de l'état actuel d'al-Faramâ, s'il plaît à Dieu.


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Page mise à jour le  11 sep 02