Chapitre XXII (deuxième partie)Sir Thomas Browne PageMademoiselle Page Chapitre II

Troisième Partie1


CHAPITRE PREMIER

(1676 - 1680)

[Quand le grand-duc vint en France, M. de Lauzun lui fit des honnêtetés], qui furent fort bien reçues2 et que le grand-duc parut n'avoir pas oubliées ; car dans le temps de mon mariage il pria l'ambassadeur de Venise, qui étoit son ami (dont j'ai parlé plusieurs fois sans le nommer ; il s'appeloit Contarini) de lui faire ses compliments, qu'il reçut le mieux du monde. Malgré le déchaînement de Madame, il lui manda qu'il tenoit à honneur de l'avoir pour son beau-frère et qu'il trouveroit toujours en lui un bon ami. L'ambassadeur eut un grand plaisir à me dire cette réponse, et quelque mal que je fusse avec Madame, il continua la même amitié et correspondance qu'il a toujours fait avec moi.

Barail fit quelques campagnes avec le marquis de Sauvebœuf,3 qui avoit un régiment de dragons, que M. de Lauzun lui avoit fait donner. Il avoit été cadet dans la compagnie. Tout ce qu'il y avoit de gens de qualité en ce temps-là se mettoient dans les gardes du corps ; c'étoit la mode. La compagnie de Noailles et celle de Lauzun et particulièrement cette dernière avoient tout, et les autres peu. Barail fit aussi une campagne sur mer. Il ne perdit nulle occasion de servir le roi et de se distinguer dans les occasions, croyant par là être plus en état de pouvoir servir M. de Lauzun pour lequel il avoit une véritable passion.

Les hivers il venoit à Paris et venoit plutôt deux fois qu'une à Luxembourg, où il servoit M. de Lauzun fort utilement ; car les manières de madame de Nogent ne me plaisoient pas toujours ; je découvris qu'elle étoit la plus grande comédienne du monde,4 et que son mari et elle étoient si mal ensemble, quand il mourut, qu'elle étoit sur le point de se séparer, qu'il étoit toujours amoureux, mangeoit son bien, et la méprisoit fort ; ce qui n'est pas une chose fort agréable pour une femme et surtout pour elle qui étoit d'une qualité au-dessus de lui, qui lui avoit porté plus de bien qu'il n'en pouvoit espérer par les bienfaits du roi et qui lui avoit donné la lieutenance de roi d'Auvergne. Elle l'avoit choisi par son inclination, contre le gré de M. de Lauzun ; il en étoit méconnoissant. Elle jouoit son personnage à merveille ; car elle s'évanouissoit avec des convulsions, dès qu'elle voyoit des personnes qui avoient perdu quelqu'un au passage du Rhin, ou qui y avoient quelque rapport. M. de Vaubrun5, son beau-frère, fut tué en Allemagne ; j'étois lors à Eu,6 où elle étoit avec moi quand elle on apprit la nouvelle. Je savois qu'elle ne l'aimoit point ; elle ne laissa pas de faire toutes ses démonstrations de douleur, comme si elle en eût eu véritablement. Elle avoit un ouvrage tout composé de larmes, d'os, de têtes de morts, de flammes, de cœurs, pour faire un parement d'autel à Saint-Evenard, où elle disoit qu'étoit le corps de M. de Nogent, quoique personne ne lui eût dit. C'est un village près de Tolhus : elle y vouloit fonder un couvent de capucines et s'y mettre quand elle auroit établi ses quatre enfants, deux fils et deux filles, dont l'aînée n'avoit que dix ans. J'écoutois tout cela avec beaucoup de pitié et de tendresse, pour mieux dire avec sottise ; car je ne savois pas qu'ils fussent mal ensemble ; je croyois qu'elle l'aimoit véritablement ; mais je ne devois pas m'attendrir d'une chose si éloignée, et le projet d'enterrer un homme noyé et de bâtir un couvent de capucines, tout cela me devoit faire voir l'impossibilité de son projet et le caractère de son esprit d'en croire abuser les gens. Et quand elle témoignoit tant d'empressement pour M. de Lauzun, je me devois souvenir que M. de Lauzun m'avoit dit cent fois : « Ma sœur est une comédienne : elle ne m'aime point, ni ce bourgeois d'Angers.7 S'ils croyoient que j'eusse de l'argent dans les os, ils me les casseroient, tant ils sont intéressés. »

Comme on ne se souvient pas toujours des choses dans les temps et qu'il est difficile, étant aussi occupée d'une seule chose que je l'étois, lorsque j'ai écrit l'endroit de ces Mémoires qui font assez connoître que je l'étois, j'ai oublié mille choses dont je me souviens à cette heure que je ne la suis plus. Il paroîtra assez que je les ai discontinués bien des années8 : ce qui fait faire bien des digressions qui pourront être ennuyeuses. Quand M. d'Artagnan revint de mener M. de Lauzun à Pignerol, il dit au roi et à M. de Louvois qu'il lui avoit dit de supplier très-humblement le roi que Nogent ni sa sœur ne se mêlassent de rien de ses affaires et ne missent pas la main sur le peu d'argent qu'il avoit laissé, ni sur ses pierreries, sa vaisselle d'argent, qui n'étoit pas en grand nombre, et que ce fût Barail et Rollinde qui s'en mêlassent. On trouva, à ce que j'ai ouï dire à M. de Rochefort, force portraits de dames, entourés de médiocres diamants. Si j'avois eu bien de la curiosité, j'aurois pu voir ceux qui étoient de manière à pouvoir être vus ; mais je ne m'en souciai pas, et j'en ai même oubliés les noms ; je crois qu'elles en ont toutes fait pénitence et qu'il n'en reste plus au monde. Madame de Nogent fut fort fâchée quand je sus ce qu'Artagnan avoit dit au roi et à M. de Louvois. Il étoit fort de ses amis, et c'étoit une ancienne amitié du temps qu'elle étoit fille de la reine. Elle avoit une compagne, nommé Saluce, fort jolie, dont M. de Louvois étoit amoureux ; elle en étoit confidente ; elle étoit sa parente, et comme M. de Louvois la vouloit épouser, ce commerce n'étoit que bon, le mariage étant fort avantageux pour sa parent.9 Quoique M. de Louvois ne fût pas des amis de M. de Lauzun, madame de Nogent a toujours conservé beaucoup de commerce avec lui, et j'ai su qu'elle lui avoit promis, peu de temps après sa prison, qu'elle ne feroit jamais un pas pour sa liberté sans son ordre ; et que si je voulois agir pour cela et qu'elle en eût connoissance, elle lui diroit. Dans les commencements, on ne faisoit que des sottises, et l'on savoit si peu la cause de sa prison, et ses amis et les personnes qui s'y intéressoient étoient si étourdis de son malheur et de la douleur qu'elle causoit, qu'ils ne savoient quasi que faire pour sa liberté. M. de Louvois et M. Le Tellier, son père, lui avoient toujours été fort contraires : le premier ne lui avoit jamais pardonné l'amour qu'il avoit eu pour sa fille, madame de Villequier. Pour l'autre, qui vouloit être le maître de la guerre, [et] que toutes les charges qui la regardoient et les commandements dépendissent de lui, il ne pouvoit souffrir la grande ambition de M. de Lauzun, qui vouloit pousser sa fortune par là et qu'il voyoit bien qui n'étoit pas d'humeur à soumettre à lui ; la grande inclination que le roi avoit pour lui, tout cela lui donnoit beaucoup de jalousie contre M. de Lauzun : on disoit que c'étoit lui qui avoit empêché qu'il ne fût grand maître de l'artillerie, lorsque le comte Du Lude le fut.10 Ils avoient eu mille démêlés en toutes rencontres,11 où M. de Lauzun prenoit toujours les choses d'une grande hauteur. Ainsi on l'accusoit fort d'avoir, par ses mauvais offices, contribué à sa prison, et son père12 ; et [on disoit] que l'on l'avoit fort battu en ruine sur ce qu'il étoit capable d'avoir de grands desseins, puisqu'il avoit osé avoir celui de m'épouser.

On croyoit aussi que madame de Montespan, qui avoit été fort de ses amis, avoit changé ; car on ne croira pas que cette affaire, qui ne paroissoit pas désagréable au roi, ait pu lui être à elle.13 Enfin quand le malheur en veut aux gens, on y cherche des causes qui en sont fort innocentes. Quelquefois je crois que ce fut son malheur seul qui lui attira et celui-là et tous ceux qui lui sont arrivés depuis. Pour moi, je n'avois garde de croire que ce fût mauvaise conduite : je ne lui connoissois point de défauts en ce temps-là, et j'ose dire que j'avois cela de commun avec le roi. Peu de temps après la rupture de notre mariage, le roi le voulut faire duc et maréchal de France ; il le refusa et dit que rien ne pouvoit jamais le consoler de ce qu'il avoit perdu et que rien ne pouvoit réparer sa perte ; il remercioit très-humblement le roi ; qu'il ne vouloit rien. Cela fut approuvé de peu et blâmé de beaucoup, parce qu'il avoit des envieux ; car autrement rien n'étoit si beau que cela. On se servit de ce refus pour lui nuire, disant qu'il prenoit les choses avec trop de fierté ; il est vrai qu'il ne l'avoit jamais été tant que depuis notre affaire : il me semble qu'il en avoit raison de l'être. Il avoit, à ce que l'on dit, souvent des démêlés avec madame de Montespan : cela n'est pas venu à ma connoissance et je ne m'en suis pas informée ; mais je sais bien qu'ils prennent aisément feu tous deux.14

Je reviendrai souvent à Barail, quoique j'en paroisse éloignée. Je lui contois tout ce que j'entendois dire de M. de Lauzun ; personne ne travailloit à lui rendre de bons offices auprès de moi [que Barail]. Comme l'on croyoit que les soins que je prendrois pour le faire sortir pourroient être de quelque poids, on tâchoit de lui nuire en tout ce que l'on pouvoit, et Barail me trouvoit fort souvent bien dégoûtée de tout ce que l'on m'en disoit : il raccommodoit tout et s'en alloit bien content. Personne ne se seroit jamais avisé de ce que j'ai fait pour le faire sortir ; mais il n'est pas encore temps de le dire. Madame de Nogent croyoit qu'en me disant force choses si impertinentes que je n'ose les dire, tant elles sont pauvres et basses, cela maintiendroit15 son frère auprès de moi : et tout cela faisoit un effet contraire et me mettoit en colère, et Barail raccommodoit tout : je n'ai jamais vu un si fidèle ami que celui-là et savoir si bien ménager une personne aussi difficile à gouverner que moi. On se lasse de tout, et il est aisé, quand on ne voit pas les gens, que l'on a bien aimés, et que l'on vient dire : « Il ne vous aimoit point ; quand on lui a promis de lui donner des biens, des charges, il vous a plantée là ; le jour que le roi rompit votre mariage, il joua tout le soir avec une [grande] tranquillité ; il ne soucioit point de vous. » On ne me disoit autre chose, et cela si souvent, que n'étant pas [là] pour se défendre contre de si cruels ennemis, je ne sais si mon cœur eût pu combattre tous les jours en sa faveur contre moi-même, n'étant soutenue de personne, et Barail venoit à son secours.

L'état où je me représente n'étoit pas bien heureux. M. de Lauzun fut malade à l'extrémité ; j'étois à Eu. En arrivant, j'arrêtai à Saint-Denis, aux Filles de l'Annonciade, où étoit la fille de madame de Nogent. Madame de Rannes,15 sa belle-sœur, et madame de La Moresan, sœur de madame du Frenoy, vinrent au-devant d'elle. Il est bon de dire que madame du Frenoy est une fort belle femme, dont M. de Nogent avoit été amoureux, et qu'une fois en la trouvant chez la reine, elle en étoit si jalouse qu'elle s'évanouit à sa vue, dans la ruelle du lit de la reine, qui étoit en couche, et depuis la mort de son mari elle l'aimoit passionnément, croyant, à ce qu'elle disoit, devoir aimer tout ce qu'il avoit aimé. Le mari de cette femme étoit commis de M. de Louvois, et on disoit que celui-ci en étoit amoureux ; elle étoit belle-sœur de Saint-Mars, qui commandoit dans la citadelle de Pignerol, et qui gardoit M. de Lauzun. Ainsi elle avoit bien des raisons pour avoir des égards pour ces femmes, et ces femmes en avoient peu pour M. de Lauzun. Madame de Montespan me demanda si je ne savois rien ; je lui dis que non, et je ne soupçonnai jamais que cette question regardât M. de Lauzun. Elle s'étonnoit que je fusse si gaie ; je n'y entendois encore rien.

Quand je fus à Paris, je trouvai beaucoup de gens à Luxembourg, entre autres l'archevêque d'Embrun et la maréchale de Créqui, qui en avoit toujours très-bien usé pour M. de Lauzun, et son mari aussi ; ce que n'avoient pas fait bien des gens qui lui avoient de l'obligation. Je ris avec l'archevêque, comme j'avois accoutumé : il voyoit bien que je ne savois rien ; la maréchale étoit sur des épines. Enfin elle me dit : « Venez un moment dans votre petite chambre ; » j'y allai ; elle me dit : « M. de Lauzun a été à l'extrémité ; mais il est hors de danger ; je mourois de peur qu'on ne vous l'eût dit mal à propos. » Je la questionnai et la remerciai beaucoup. Madame de Nogent, qui s'étoit mise dans le carrosse de sa belle-sœur, vint, entra parla garde-robe, et s'assit effrayée, pleurant et faisant son manège ordinaire sur la santé de M. de Lauzun. Madame de La Moresan lui disoit : « Hélas ! madame, de quoi vous fâchez-vous ? Vous auriez été bienheureuse que M. votre frère fût mort d'une mort ordinaire : c'est un homme si emporté, qu'un de ces jours on le trouva pendu ; il est tout propre à faire quelque folie. » Elle continua un quart-d'heure de cette force. J'admirai madame de Nogent d'entendre un tel discours de sa folle amie, et qu'elle eût assez peu de jugement pour ne pas comprendre que c'étoit me manquer de respect que de parler ainsi de M. de Lauzun devant moi, après tout ce qui s'étoit passé. J'admire aussi ma sagesse et ma modération ; mais il a bien fallu que j'en eusse dont j'ai bien souffert ; mais on a quelquefois plus de mérite à se taire qu'à parler avec de certaines gens.

Je faisois toujours ma cour avec soin, et quand je trouvois quelque occasion de parler de M. de Lauzun devant le roi, ou de dire quelque chose qui l'en pouvoit faire souvenir, j'étois ravie. Je faisois les voyages de la cour ; quand j'y étois, je voyois madame de Montespan souvent. Elle ne me faisoit plus sa cour ; car elle ne sortoit point qu'avec le roi ; elle alloit même peu souvent avec la reine : mais quand elle y venoit, ou que j'allois chez elle, elle n'a jamais discontinué de vivre avec moi a l'ordinaire, c'est-à-dire avec beaucoup d'empressement pour tout ce qui me regarde. Elle accoucha de mademoiselle de Nantes à Tournay,16 pendant le séjour que la reine y fit durant le siége de Maestricht ; elle logeoit dans la citadelle. Je sus à point nommé le jour qu'elle accoucha ; je connoissois des officiers qui étoient en garnison dans la citadelle, qui me l'apprirent. M. du Maine étoit né quelques années devant17 ; il y en avoit eu encore un qui étoit mort, que l'on n'a jamais vu. On avoit mis auprès d'eux madame Scarron, femme de beaucoup d'esprit, fort aimable, que madame de Montespan avoit connue chez madame la maréchale d'Albret, d'où elle ne bougeoit. Je l'avois vue autrefois, mais peu, et je la connue à ce voyage qu'elle fit avec madame de Montespan.18 Elle demeuroit au faubourg Saint-Germain, par-delà les Carmes, où étoient ces enfants. Je ne sais pas s'ils n'avoient pas été ailleurs avant ; car cela étoit si caché que l'on n'en parloit point. J'ai ouï conter à M. de Lauzun que le jour qu'elle accoucha de M. du Maine (c'étoit à minuit sonnant, le dernier jour de mars ou le premier d'avril, si l'on veut ; cela est si peu important, que je ne me donne pas la peine d'en chercher l'année), on n'eut pas le temps de l'emmailloter, on l'entortilla dans un lange, et il prit dans son manteau et le cacha et l'emporta dans un carrosse qui l'attendoit au petit parc de Saint-Germain. Il mourut de peur qu'il ne criât.

Comme madame de La Vallière n'a jamais été autant de mes amis que madame de Montespan, j'oublierai plus volontiers ce qui la regarde. Depuis qu'elle étoit revenue à la cour, du vouent de Chaillot, où elle n'avoit été que douze heures, elle avoit mené une vie plus retirée qu'à l'ordinaire, et tout comme une personne qui se vouloit retirer tout à fait : elle s'habilloit plus modestement. J'oubliois à dire qu'elle avoit eu deux garçons, dont l'un étoit mort de la peur qu'il eût d'un coup de tonnerre ; cela ne marquoit pas qu'il eût été un grand capitaine, ni qu'il tînt du roi. Ainsi je crois que l'on s'en consola, aussi bien que du dessein que la mère prit de se retirer tout à fait. Elle étoit fort jolie, fort aimable de sa figure. Quoiqu'elle fût d'une fort grande [taille],19 elle dansoit bien, étoit de fort bonne grâce à cheval : l'habit lui en seyoit fort bien ; car les justaucorps cachent la gorge qu'elle avoit fort maigre, et les cravates font paroître plus grasse. Elle faisoit des mines fort spirituelles ; car les connoisseurs disoient qu'elle avoit peu d'esprit, et même on disoit que la lettre qu'elle avoit écrite au roi, en s'en allant à Sainte-Marie, c'étoit M. de Lauzun qui la lui avoit faite, et qu'il croyoit rallumer l'amour du roi par cette retraite. Le maréchal de Bellefonds, qui est fort dévot, s'attacha fort à la voir ; même on croyoit qu'il lui avoit indiqué, pour la conduire, le P. Sécar, carme déchaussé, qui lui conseilla de se faire carmélite. On disoit que son dessein avoit été de demeurer dans une maison, vivant avec beaucoup de régularité et faire élever ses enfants ; mais on la trouva encore trop jeune pour cela : le roi [le] lui refusa. On disoit que c'étoit sa mère, qui y trouvoit son intérêt, qui étoit de cet avis ; mais le roi n'aimoit ni n'estimoit sa mère, et même elle n'avoit pas la liberté de la voir souvent ; et comme le roi connoissoit l'humeur de madame de La Vallière, il craignoit, à ce que l'on dit, de la laisser sur la bonne foi. Elle jouissoit d'un gros bien, avec beaucoup de pierreries, des meubles ; ainsi il se seroit peut-être trouvé des gens qui auroient été bien aises de les escroquer, et on vouloit les conserver pour ses enfants. Depuis que le roi ne l'aimoit plus, il avoit couru un bruit que M. de Longueville en étoit amoureux ; mais on empêcha que cela ne courût plus longtemps. On dit même qu'elle s'étoit mise dans la tête d'épouser M. de Lauzun ; mais je crois que ce sont ses ennemis qui avoient fait courre ce bruit-là : il a le cœur trop bien fait pour [que], en quelque état qu'il ait pu jamais être, il eût voulu la maîtresse d'un autre, même du roi ; et après ce qui lui étoit arrivé, auroit-on pu dire pis de lui ? Aussi on attribua cela à ses ennemis. Madame de La Vallière avoit encore eu la pensée de se retirer à Chaillot avec mademoiselle de La Motte,20 qui est fort son amie. Cet état incertain21 ne plaisoit point au roi, qui en vouloit un honorable pour ses enfants. Enfin elle se mit aux Carmélites et y alla un jour que le roi partit pour son voyage22 ; elle entendit la messe du roi et mont dans son carrosse, et alla aux Carmélites. Je lui fus dire adieu le soir chez madame de Montespan, où elle soupoit. Elle prit l'habit pendant que la cour étoit dehors, et au bout de l'an elle fit profession, où la reine fut, et j'eus l'honneur de l'y accompagner. Depuis ce temps on n'a plus parlé d'elle. Elle est une fort bonne religieuse et passe présentement pour avoir beaucoup d'esprit : la grâce a fait ce que n'avoit pas fait la nature, et les effets de l'une lui ont été bien plus avantageux que [ceux] de l'autre. Il est difficile que les chagrins ne fassent pas avoir de retours à Dieu.

Comme j'ai toujours beaucoup aimé les Carmélites et que j'y ai été souvent, je me mis à y aller encore plus qu'à l'ordinaire ; j'allois tous les dimanches à ma paroisse et je m'affectionnai à aller au prône. Il y avoit un vicaire qui en faisoit de fort beaux ; je fus à confesse à lui et je l'entretenois souvent aux Carmélites. C'est un fort homme de bien, mais qui ne connoît point du tout le monde. Il me prit fantaisie de louer un appartement dehors des Carmélites, que madame de Longueville avoit fait accommoder avant qu'elle eût la maison de M. Le Camus, où elle est morte, voulant y aller demeurer les bonnes fêtes, ne voulant pas coucher dans le couvent, mais y aller passer les journées et revenir le soir pour les passer à causer avec Barail. je lui communiquai ce dessein ; il le désapprouva, et me dit que ce seroit une manière de retraite qui ne me convenoit point, ni à l'état de M. de Lauzun ; que ce seroit abandonner ses intérêts. Il en parla à Rollinde, qui me déconseilla fort aussi.

A propos de madame de Longueville,23 je ne puis pas me passer de dire que je la regrettai fort ; elle m'avoit toujours donné de grandes marques d'estime et d'amitié. Car depuis que je l'eus revue et que M. de Lauzun fut arrêté, elle me fit reparler tout de nouveau par madame de Puysieux et par mademoiselle de Vertus, d'épouser son fils. On lui avoit fait quelques propositions pour le faire roi de Pologne, les Polonois voulant ôter le roi Michel,24 dont ils ne s'accommodoient pas, et l'Empereur voulant bien démarier sa sœur (je ne sais par quelle raison il croyoit en pouvoir user ainsi) ; mais il ne vouloit pas consentir qu'ils élussent un autre roi, s'il n'épousoit sa sœur. Madame de Longueville me fit dire qu'elle me demandoit encore une fois si je voudrois faire l'honneur à son fils de le vouloir épouser, et qu'il n'y avoit ni royaume ni sœur de l'Empereur à quoi elle ne me préferât ; que l'affaire de M. de Lauzun n'avoit rien changé à son dessein ; que ce n'étoit pas une chose extraordinaire que l'on eût voulu un homme de son mérite, pour qui j'avois de l'inclination et que je pouvois faire un fort grand seigneur ; et que voyant l'affaire rompue, j'avois assez de raison pour croire que je n'y songerois plus ; qu'ainsi elle souhaitoit l'affaire plus que jamais. Je lui répondis que je ne me voulois plus marier ; que c'étoit de ces envies que l'on ne pouvoit avoir deux fois, et que d'en avoir eu envie c'étoit assez pour connoître que l'on étoit bien heureux que l'on n'y eût pas réussi ; et que cette marque d'estime qu'elle me donnoit m'étoit si sensible, que j'en étois touchée de la plus vive reconnoissance que l'on pouvoit sentir.

Elle s'embarqua à l'affaire de Pologne, et un gentilhomme de Normandie, nommé Caillières, qui avoit entré dans cette négociation, m'a dit depuis que la chose étoit faite quand il mourut,25 c'est-à-dire à l'égard des Polonois ; car, quoique le roi eût permis cette négociation, je ne sais s'il en eût eu la réussite agréable, et s'il ne la traversoit point ; car il n'a jamais aimé M. de Longueville. En toutes occasions il a paru qu'il ne l'aimoit pas ; il avoit des manières qui ne plaisoient pas à tout le monde. Ils étoient deux frères : l'un étoit fort mal agréable et l'autre fort joli, étant petits,26 et madame de Longueville avoit toujours mieux aimé le comte de Saint-Paul, qui étoit celui-ci ; c'étoit le cadet ; M. de Longueville aimoit mieux l'aîné. En croissant, il devint fort extraordinaire et avoit des dévotions qui l'étoient aussi. Il voulut être jésuite : on fit ce que l'on put pour l'en empêcher ; enfin il prit l'habit, puis le quitta ; il voulut être prêtre. M. le Prince, qui voyoit bien que ce ne seroit point un grand personnage, y consentit. On eut une dispense du pape pour qu'il le fût avant l'âge : on l'appela l'abbé d'Orléans, et l'autre M. de Longueville. Quand le père mourut, le roi ne lui donna pas le gouvernement.27 M. de Longueville avoit le visage assez beau, une belle tête, de beaux cheveux, mais une vilaine taille et l'air peu noble. Les gens qui le connoissoient particulièrement disent qu'il avoit beaucoup d'esprit ; il parloit peu ; mais il avoit un air fort méprisant, qui ne le faisoit pas aimer. Il l'étoit fort des dames ; il avoit beaucoup d'amies : madame de Thianges l'étoit fort, comme j'ai déjà dit, la marquise d'Uxelles et beaucoup d'autres : elles vouloient aller en Pologne avec lui. Quand il mourut, elles en portèrent le deuil et témoignèrent une grande douleur.

Dans le temps que j'allois tous les jours aux Carmélites, M. l'abbé de La Trappe28 vint à Paris ; cet homme dont on parloit tant de la retraite et des austérités dans ce temps-là, et dont j'ai dit qu'il avoit assisté mon père à la mort, je le vis souvent ; on disoit qu'il me vouloit inspirer d'être carmélite ; mais il n'y songea jamais. Il avoit trop d'esprit pour ne connoître pas que les personnes de ma qualité peuvent faire plus de bien dans le monde que dans la retraite, et qu'elles se sauvent en sauvant les autres, quand elles savent user de leur qualité pour donner de bons exemples et assister la veuve et l'orphelin de leur bourse et de leur protection.29 Dans cet esprit je fis bâtir un hôpital à Eu pour l'instruction des enfants, que je fondai,30 gouverné par des sœurs de la Charité, que l'on appelle l'hôpital de Sainte-Anne. Quand j'y suis, je vais souvent les voir travailler, et je m'informe avec soin s'il est bien administré. J'ai fait bâtir aussi un séminaire des mêmes sœurs de la Charité à Eu, où elles sont douze qui portent la marmite aux malades, comme à Paris, et instruisent les pauvres enfants : tout cela est bien fondé.

Pendant que j'étois sur le chapitre de M. de Longueville et ses enfants, j'ai oublié à dire qu'il déclara un bâtard qu'il avoit, au parlement, afin qu'il lui pût donner du bien. On ne nomma point la mère. Comme il faut des lettres-patentes du roi pour cela, on ne fut pas fâché de cet exemple ; car on déclara lors M. du Maine et mademoiselle de Nantes. Je ne me souviens plus si M. le comte du Vexin et mademoiselle de Tours le furent en même temps. La mère du chevalier de Longueville étoit une femme de qualité,31 dont le mari étoit vivant, qui disoit à tout le monde dans ce temps-là : « Ne savez-vous point qui est la mère du chevalier de Longueville ? » Personne ne lui disoit, et si tout le monde le savoit.

M. de Lauzun se pensa sauver : il avoit fait un trou à sa cheminée, il étoit sorti hors de la citadelle ; il n'avoit plus qu'une porte à passer ; mais la sentinelle d'un magasin l'arrêta ; et quelque prière qu'il lui pût faire et quelque pitié qu'il lui témoignât avoir de lui, il appela, et l'on le mit dans sa même chambre plus gardé qu'auparavant. M. Fouquet étoit à Pignerol : ils se voyoient et mangeoient souvent ensemble ; même il y eut un temps qu'il voyoit madame Fouquet, qui avoit eu permission d'aller voir son mari, et mademoiselle Fouquet, sa fille. Madame de Saint-Mars32 alloit chez madame Fouquet, jouoit avec eux. Il y eut plusieurs démêlés entre eux : les officiers de la garnison les voyoient ; ils voient assez de liberté. Je ne sais plus si c'étoit devant ou après qu'il voulut se sauver. Il se fit force contes, dits et redits sur des galanteries qui les brouillèrent, M. Fouquet et lui.33 Les officiers étoient curieux de raconter ces belles intrigues : M. de Lauzun en fut sevré.34 Comme toutes ces histoires ne lui étoient pas avantageuses, on prenoit un grand soin de me les cacher ; aussi ne les ai-je sues que depuis. Barail eut permission d'y aller ; il y resta huit jours ; les premiers, Saint-Mars étoit toujours en tiers. Enfin M. de Lauzun trouva invention de mettre une lettre dans un morceau d'étoffe que l'on met devant les cheminées, et Barail lui fit réponse ; après quoi il fut fort gai, et Saint-Mars lui disoit : « Voilà comme il faut être ; » et il trouva moyen d'entretenir Barail d'une manière qu'il lui fit entendre tout ce qu'il voulut, sans que Saint-Mars s'en aperçût, et il [Saint-Mars] disoit à Barail : « Vous voyez bien que sa prison lui a changé l'esprit ; car il dit mille choses que l'on n'entend point. » Vous jugez bien qu'il lui parla fort de moi, et que Barail n'oublia rien de tout ce qu'il me falloit dire pour m'engager plus que jamais à être dans ses intérêts. M. de Lauzun de se plaignoit d'avoir un bras dont il ne s'aidoit point, et demandoit que l'on lui envoyât un chirurgien. Madame de Nogent fit force allées et venues pour l'obtenir ; Barail y alloit aussi. Tant qu'il n'y eut que madame de Nogent, elle n'obtint rien ; enfin les assiduités de Barail à se montrer devant le roi, et les persécutions qu'il faisoit à M. de Louvois, firent que l'on lui permit d'y mener un chirurgien, et ce fut la cause de son voyage. Le chirurgien dit qu'il ne pouvoit guérir qu'il ne prit des eaux de Bourbon.

Toutes les affaires de M. de Lauzun font que j'oublie de mettre les choses dans les temps où elles sont arrivées. Le roi maria Mademoiselle,35 fille de Monsieur, au roi d'Espagne. Le détail de tout ce qui se passa à cette cérémonie sera assez écrit ailleurs sans que j'en parle ; tout ce que j'en dirai, c'est que Monsieur eût bien voulu, et avec raison, qu'elle eût épousé M. le Dauphin. Je disois souvent à Monsieur : « Ne menez pas votre fille si souvent ici ; cela lui donnera des dégoûts pour tous les autres partis, et si elle n'épouse pas M. le Dauphin, vous lui empoisonnez le reste de sa vie par l'espérance qu'elle en aura eue. » M. le Dauphin ne donnoit nulle marque qu'il souhaitât ce mariage, ni le roi non plus. Quand on déclara celui d'Espagne, M. le Dauphin lui vint dire : « Ma cousine, de me réjouis de votre mariage ; quand vous serez en Espagne vous m'enverrez du tourou36 : car je l'aime fort. » Cela la mit au désespoir, et elle ne l'oublia pas. Car après avoir pris congé du roi, qui l'étoit allé conduire dans la forêt de Fontainebleau, elle monta vite en carrosse sans dire adieu à Monsieur. La princesse d'Harcourt37 l'accompagna, qui est une fort sotte femme, et qui en usa fort malhabilement en bien des choses qui ont nui à cette pauvre princesse, qui étoit fort enfant, et que eût eu besoin de quelque personne prudente pour redresser mille légères fautes que les gens de son âge peuvent faire par l'imprudence de la jeunesse, et où il n'y a nul mal ; mais les Espagnols ne pardonnent rien. M. et madame de Los Balbazès38 étoient fort bonnes gens ; mais il y avoit un grand d'Espagne qui vint après, qui s'appeloit le duc de Pastranne, qui dit force choses mal à propos, et qui ont bien contribué à son malheur et à sa tragique fin. J'ai ouï dire à des dames qui étoient auprès de lui au bal, que l'on ne lui sut jamais faire louer la reine, qui étoit fort belle et qui dansoit à merveille. Il dit en Espagne, à ce qu'on a su, qu'il n'y avoit pas une seule femme en France qui valût quelque chose. Il en trouva quelques-unes d'assez bonne volonté, à ce que l'on dit dans ce temps-là ; mais il falloit l'être beaucoup pour qu'il pût plaire ; car il paroissoit assez mal fait. Il donna beaucoup de parfums et de pastilles à Fontainebleau, à ce que j'ai entendu dire ; car il arriva peu de temps avant le mariage, et partit aussitôt après ; j'allai à Eu. Le comte de Mansfeld39 est celui qui est cause de sa mort, à ce que l'on a dit ; je ne sais rien de certain, sinon qu'elle est morte, et que j'en ai été fort fâchée. Elle m'écrivoit souvent et me témoignoit beaucoup d'amitié.

L'hiver d'après,40 on parla fort que Monseigneur se marieroit. Un jour le roi, en entrant devant le dîner chez la reine, comme il avoit accoutumé, tenoit un portrait à sa main, qu'il attacha sur la tapisserie, et dit : « Voilà la princesse de Bavière.41 » Il l'avoit montré à Monseigneur chez madame de Montespan, qui étoit fort content. Le roi dit : « Elle n'est pas belle, mais elle ne déplaît pas ; elle a beaucoup de mérite. » Tout le monde approuva ce choix : pur moi, qui aimois fort sa mère sans l'avoir jamais vue, j'en fus fort aise. Elle étoit de Savoie et ma cousine germaine ; elle avoit pris une amitié pour moi fort grande ; elle m'écrivoit souvent, et moi à elle ; elle m'envoyoit des présents, et je lui en envoyois de bien plus beaux, elle m'envoyoit aussi les livres de tous les ballets qu'elle dansoit, dont elle avoit fait les vers ; car elle avoit l'esprit un peu romanesque. On dit que la cour de Savoie avoit fort de cet air-là, et le peu de politesse qu'elle avoit trouvé à la cour de Bavière, et la manière dont on y vivoit, qui avoit un peu celle d'Espagne, j'y confirmoient ; car elle ne faisoit que lire tous les romans en toutes les langues et des vers. Elle m'écrivoit fort civilement : ce qui n'est pas ordinaire, à ce que l'on dit, en Allemagne, où ils sont fort fiers. Une fois que l'on parloit d'elle devant le roi, M. le maréchal de Gramont, qui l'avoit vue et en disoit du bien me demanda comme elle m'écrivoit. Je lui dis : « Au commencement : Mademoiselle ma cousine, et au bas : Votre très-humble cousine et servante ;et qu'elle me traitoit d'Altesse royale ; et au-dessus : A Son Altesse royale Mademoiselle ma cousine, et que je lui avois écrit de même. » Il me demanda : « Vous a-t-elle fait réponse ? » Je lui dis : « Nous nous sommes écrit souvent, et sur les derniers temps, sans commencement et sans fin. » Il en douta, ou que ce ne fût pas sans la participation du beau-père. A quoi j'ajoutai que M. l'Électeur palatin, qui étoit mon parent du côté de ma mère, m'avoit écrit de même.

Pendant que je suis sur les rangs, j'ai oublié de dire que la reine d'Espagne me donna une chaise à bras, et aux princesses du sang une à dos ; et quand on demanda à Los Balbazès si elle n'en useroit pas ainsi, il n'en fit nulle difficulté. Le feu roi d'Angleterre dernier mort42 en usoit de même ; pour la reine sa mère, elle ne me donnoit qu'un siége ; elle étoit ma tante, et par cette raison je lui portois tout le respect imaginable, faisant plus de cas d'une fille de France que des reines, de quelque pays qu'elles puissent être.

Comme on était à Versailles,43 un carême au temps de Pâques (l'année sera marqué en tant d'endroits dans les histoires et mémoires de ce temps que je n'ai que faire de la mettre ici44), madame de Montespan s'en alla : on fut fort étonné de cette retraite ; le roi en fut fort affligé. Il ne fit pas la cène, même on le vit peu ce jour-là ; il vint chez la reine les yeux rouges, comme un homme qui avoit fort pleuré. On parla différemment de cette retraite. Je fus à Paris et je l'allai voir en cette maison, où étoient ses enfants. Madame de Maintenon, que l'on commençoit en ce temps-là à appeler ainsi, en ayant acheté la terre, étoit avec elle. Je lui demandai si elle ne reviendroit pas bientôt ; elle se mit à rire et ne me répondit rien. Comme je l'aimois fort, je ne savois que souhaiter pour elle : elle ne voyoit personne. Comme tout le monde étoit fort alerte sur son retour, quoique personne ne parût s'en mêler, on sut que M. Bossuet,45 présentement évêque de Meaux et précepteur pour lors de Monseigneur, y venoit tous les soirs avec un manteau gris sur son nez ; madame de Richelieu y venoit aussi. Enfin elle revint, et le roi la fut voir à Clagny. Et madame de Richelieu disoit : « Je suis toujours en tiers. » Apparemment ce tiers-là ne dura pas longtemps46 ; car madame de Montespan eut mademoiselle de Blois47 et M. le comte de Toulouse,48 qui furent nourris chez madame d'Arbon, femme d'un commis de M. Le Tellier, et tenus fort cachés.

On alla au-devant de madame la Dauphin jusqu'à Châlons ; le roi alla coucher à Vitry-le-François, deux jours après, et alla au-devant d'elle ; elle y coucha et la reine demeura à Châlons, fâchée que le roi l'eût vue avant elle. Livry revint à Châlons pour dire à la reine l'heure qu'elle devoit partir le lendemain. La reine lui demanda comment il l'avoit trouvée ; il lui dit : « Le premier coup d'œil n'est pas beau. » La reine ne fut pas bien loin de Châlons ; on trouva le roi qui descendit de carrosse, et présenta madame la Dauphine à la reine. Elle étoit habillée de brocart blanc, des rubans blancs à sa coiffure, qui étoit défrisée ; ses cheveux noirs ; le froid l'avoit rougie. Elle a une fort belle taille ; mais elle n'étoit pas en beauté, 49 et Livry avoit raison de dire que le premier coup d'œil n'étoit pas beau. Elle salua ensuite Madame et moi ; elle me fit mille amitiés Dans le carrosse, elle me parla de celle que madame sa mère avoit pour moi, et qu'elle lui disoit toujours : « Si vous êtes mariée en France, faites votre première amie de Mademoiselle ; c'est la mienne. » Elle ne fut point embarrassée ; elle causa beaucoup. Si je ne me trompe, il n'y avoit dans le carrosse que le roi, la reine, madame la Dauphine, Madame et moi au devant, Monseigneur et Monsieur aux portières. Dans l'autre carrosse étoient madame de Guise et madame la Princesse, madame la Princesse de Conti, mademoiselle de Bourbon et les dames de la reine.

On arriva à Châlons, où n mena madame la Dauphine dans sa chambre. Elle voulut se confesser comme on l'alloit marier : la première cérémonie avoit été faite à Munich. On fut fort embarrassé ; car il n'y avoit personne qui sût l'allemand, et elle ne se savoit pas confesser en françois. On trouva heureusement un chanoine de Liége, nommé de Viarset, qui étoit venu voir le cardinal de Bouillon, qui pour lors songeoit à être prince de Liége, celui qui l'étoit étant fort vieux ; et comme cette dignité est élective, il ménageoit les gens du pays. Elle se confessa donc à M. de Viarset. Ce qui nous paroissoit un peu surprenant ; car, hors qu'il étoit vieux, les chanoines de ce pays-là, comme j'ai dit ailleurs, sont habillés comme les autres, ont de grands cheveux, et n'ont pas l'air à donner de la dévotion de se confesser à eux. Comme tout cela fut fait, on alla à la chapelle de M. de Châlons où on les maria. Le roi, la reine et toutes les princesses le furent coucher après souper. La reine lui donna sa chemise.

Le lendemain on alla à sa chambre, et on la mena à la messe à la cathédrale, où l'on fit encore quelque cérémonie.50 L'après-dînée on lui porta un présent que nous avions vu ranger chez madame de Montespan ; il y avoit des pierreries et toutes sortes de jolies choses, et en grande quantité de tout ce que l'on se peut imaginer, madame de Montespan étant la femme du monde qui se connoît le mieux à toutes choses, et qui y avoit pris grand plaisir. En voyant tout cela, elle disoit : « Madame la Dauphine vous donnera de tout cela ; ce lui sera un grand plaisir de donner ces bijoux. » Ce ne fut point cela ; car à mesure qu'elle les voyoit, elle disoit : « Serrez cela ; » et n'en offrit à personne, pas même à la reine, qui en auroit été fort aise, et qui disoit, quand on lui montra ce présent : « Le mien n'étoit pas si beau, quoique je fusse plus grande dame ; main on ne soucioit pas tant de moi que l'on fait d'elle. » Car la reine avoit toujours dans la tête que l'on la méprisoit, et cela faisoit qu'elle étoit jalouse de tout le monde et de toute chose. Quand on dînoit, elle ne vouloit pas que l'on mangeât ; elle disoit toujours : « On mangera tout ; l'on ne me laissera rien ; » et le roi s'en moquoit. Au voyage que je fis avec elle, où nous demeurâmes longtemps à Arras, et celui où l'on fit un long séjour à Tournay, je mangeois souvent chez moi, parce que quand le roi n'y étoit pas, elle ne mangeoit que des mets à l'espagnole, des mets que l'on lui faisoit chez la Molina, une femme de chambre qu'elle avoit amenée d'Espagne, qui avoit été à la reine, sa mère, qu'elle aimoit beaucoup, et qui avoit une grande autorité sur elle.

Puisque l'occasion s'est présentée d'en parler, je dirai qu'elle se donnoit de grands airs de gouverneur ; tout le monde lui faisoit la cour ; ma sœur de Guise lui baisoit les mains, et l'on dit qu'elle l'appeloit maman, et lui faisoit mille présents ; et toutes les femmes lui en faisoient aussi pour être bien traitées de la reine. Pour moi, je ne lui faisois ni présents ni la cour ; je ne l'ai jamais faite qu'à mes maîtres ; je n'ai pas le vol pour le subalterne. Cela n'est pas bon en bien des occasions, mais Dieu m'a fait naître dans une grande élévation : il y a proportionné mes sentiments, et on ne m'en a jamais vu de bas, Dieu merci. Les dames se pressoient, à la collation de la reine, à attraper quelque petit morceau des mets à l'espagnole, pour louer ce qui venoit de chez a Molina, qui étoit souvent assez mauvais ; et c'étoit ce qui faisoit que, quand le roi n'y étoit pas, je n'allois guère manger chez la reine, et qu'elle me le reprochoit : « Est-ce que vous ne trouvez rien de bon chez moi ? » Je lui répondis : « Madame, j'aime les mets à la françoise. » Elle grondoit les gens qui ne la traitoient pas bien. Villacerf, son premier maître d'hôtel, me demandoit quand j'y allois, afin que l'on prît soin que les choses fussent bien apprêtées ; car quand il n'y avoit que la reine, comme elle ne mangeoit que ce qui venoit de la Molina, il ne s'appliquoit pas beaucoup. Il le faisoit avec plaisir ; car j'étois fort aimée chez la reine ; je ne me plaignois jamais de rien. Madame de Guise n'étoit pas de même : elle brouilloit ; trouvoit tout mauvais, et faisoit gronder la reine, la mettoit en méchante humeur.

Ce grand goût pour tout ce qui venoit de chez la Molina me fait souvenir d'un jour à Compiègne que la reine avoit été indisposée : elle prit médecine ; et comme il faisoit fort chaud, elle la voulut prendre le soir à huit heures ; elle la prenoit d'une manière un peu extraordinaire : c'étoit dans du jus de pruneaux et à cuillerée ; Madame de Bade les lui mettoit dans la bouche. Quand le temps fut venu où l'on prend un bouillon, on lui en apporta un qui avoit la meilleure mine du monde ; la reine dit qu'il lui faisoit mal au cœur, et qu'il ne valoit rien : l'officier qui l'avoit porté étoit au désespoir, et Villacerf aussi. Nous en goutâmes toutes ; il étoit fort bon ; en fin elle n'en voulut point, et il fallut aller chez la Molina en quérir un ; on trouva un vieux bouillon du matin. Car les oilles51 de la reine étoient faites ainsi ; no lui en apportoit à dîner ; on en réchauffoit pour la collation, et la Molina en mangeoit tout le jour.52 Ce bouillon étoit noir, sentoit le roui, et par sa qualité n'étoit guère propre pour un jour de médecine, étant fait avec du poivre long et toutes sortes d'épiceries, des choux et des navets. En Espagne, ce mets dure quelquefois huit jours. La bonne Molina se donnoit de grandes libertés à parler : elle décidoit sur tout ; dans les commencements, on croyoit qu'elle se corrigeroit ; mais à la fin le roi s'en lassa ; elle chagrinoit la reine contre tout le monde, et même contre le roi : ainsi on la renvoya en Espagne, accablée de biens et de présents. On a su que, depuis qu'elle y est, elle peste autant contre l'Espagne qu'elle faisoit contre la France, quand elle y étoit. C'étoit la plus laide créature que l'on ait jamais vue ; cela faisoit toujours appréhender que la reine, qui la voyoit souvent, ne fît quelque enfant qui lui ressemblât. La reine avoit aussi amené une naine, qui étoit une monstrueuse créature ; car de ces monstres-là (car tous les nains le sont), il y en a quelquefois de jolis ; j'en ai eu plusieurs qui l'étoient fort. La bonne Molina donc ne m'épargna pas à l'affaire de M. de Lauzun ; elle dit : « Si en Espagne un sujet avoit osé prétendre à la fille du roi, on lui auroit coupé le cou ; le roi en devroit user ainsi. » Le roi trouva fort mauvais son insolence et l'on vit bien qu'elle étoit fort mal instruite des coutumes de son pays, où l'on fait bien plus de cas des grands du royaume que des princes étrangers.

La reine avoit amené avec elle une petite fille qui n'avoit que quinze ou seize ans, qu'elle appeloit Philippa. Elle demeuroit avec la Molina ; elle n'étoit pas belle ; mais elle avoit beaucoup d'esprit et de vivacité, comme ont toutes celles de sa nation ; sa faveur crut comme elle. La reine la maria à son porte-manteau, nommé de Visé, de sorte qu'elle porta ce nom ; mais la reine l'appeloit toujours Philippa. La reine disoit que c'étoit une enfante que l'on avoit trouvée dans le palais, que le roi son père avoit fait nourrir toujours avec soin, et qu'il falloit qu'elle fût fille de quelque dame du palais, et peut-être du roi, son père. Depuis le départ de la Molina, elle fit faire l'oille chez elle, et le chocolat de la reine, qui ne vouloit point que l'on sût qu'elle en prenoit ; elle en prenoit en cachette, et personne ne l'ignoroit.

 

FIN

 


NOTES

1. Cette troisième partie des Mémoires de Mademoiselle a été écrite vers 1689 ou 1690. Mademoiselle y revient sur plusieurs des faits racontés dans la seconde partie, mais avec une confusion qui trahit l'affaiblissement de sa mémoire.

2. Le commencement de la troisième partie manque dans le manuscrit autographe (fo 252) ; je l'ai rétabli d'après le sens général de la phrase, en mettant entre [ ] les mots ajoutés.

3. Les anciennes éditions ont remplacé ce nom par celui de Fabert; mais il y a ici, comme plus haut (p. 376) Sauvebœuf.

4. Mademoiselle, qui a écrit cette partie de ses Mémoires lorsqu'elle était dégoûté de Lauzun, dit le contraire de ce qu'elle a raconté plus haut. [No; she says she discovered that what she said above was false, and explains.]

5. Nicolas Bautru, marquis de Vaubrun, qui fut tué en Allemagne en 1675.

6. Mademoiselle mettait toujours antérieurement ici pour Eu, dans la partie de ses Mémoires qu'elle a écrite dans ce château.

7. Les Bautru, comtes de Nogent, étaient originaires d'Angers.

8. Ces passages, aussi bien que le changement d'écriture, et d'autres textes que nous signalons plus loin, prouvent que Mademoiselle avait laissé une longue interruption entre la seconde et la troisième partie de ses Mémoires. Elle paraît même avoir oublié la plupart des détails qu'elle avait déjà racontés.

9. On a ajouté ici dans les anciennes éditions : « Cependant M. de Louvois cessa d'être amoureux, et madame de Nogent contribua beaucoup à rompre le mariage de sa parente. »

10. Voy. les Mémoires de Saint-Simon (édit. Hachette, in-8, t. XX, p. 40 et 41).

11. Mademoiselle fait toujours rencontre masculin, suivant l'usage du XVIIde siècle. Nous y avons substitué le féminin pour ne pas trop choquer le lecteur moderne.

12. C'est-à-dire ainsi que le père de Louvois, Michel Le Tellier, qui fut successivement ministre de la guerre et chancelier de France.

13. Voy. les Mémoires de Saint-Simon (t. XX, p. 42) ; on y trouve de curieux détails sur la conduite de Lauzun à l'égard de madame de Montespan.

14. Saint-Simon raconte (Mémoires t. XX, ibid.) que Lauzun, se défiant de la sincérité de madame de Montespan, se cacha un jour dans sa chambre avant que le roi arrivât. La conversation qu'il entendit confirma ses soupçons. Peu de temps après il accabla d'injures madame de Montespan. Ce fut certainement une des causes de sa disgrâce. Il faut lire cette scène dans Saint-Simon. Voy. aussi le passage des Mémoires de Segrais cité plus haut, p. 308, note

15. Charlotte Bautru, mariée à Nicolas d'Argouges, marquis de Rannes, colonel général des dragons.

16. Louise-Françoise de Bourbon, mademoiselle de Nantes, était née le 1er juin 1673.

17. Louis-Auguste de Bourbon, duc du Maine, était né le 31 mars 1670.

18. Voy. ce que Mademoiselle a dit de ce voyage dans la seconde partie de ses Mémoires.

19. Les anciennes éditions portent : « Quoiqu'elle fût un peu boiteuse. » Le manuscrit de Mademoiselle ne dit rien de semblable. On y lit : « Quoiqu'elle fût d'une fort grande …. » Le substantif a été oublié.

20. Voy. plus haut, p. 357.

21. Mademoiselle a expliqué ailleurs ce qu'il faut entendre par ces mots état incertain. Voy. p. 357.

22. Voy. plus haut, ibid.

23. Madame de Longueville mourut le 15 avril 1679.

24. Michel Coribut Wiesniowiecky, élu roi de Pologne en 1669, mourut en 1672.

25. Le duc de Longueville fut tué, comme on l'a vu plus haut, au passage du Rhin, le 12 juin 1672.

26. Voy. plus haut, sur les fils de madame de Longueville, p. 69-70.

27. Mademoiselle veut parler du gouvernement de Normandie, qu'avait le duc de Longueville.

28. Mademoiselle veut parler du gouvernement de Normandie, qu'avait le duc de Longueville.

29. Les anciennes éditions ont remplacé ce passage par le suivant : « Et que le bon exemple et le secours qu'ils donnent à ceux qui en ont besoin sont beaucoup plus méritoires devant Dieu et plus profitables au prochain. »

30. C'est-à-dire que je dotai.

31. La maréchale de La Ferté, sur laquelle on peut consulter les Mémoires de Saint-Simon (édit. Hachette, in-8, t. XI, p. 55-56). Mademoiselle a déjà raconté ce fait plus haut, p. 358 : mais je n'ai pas cru devoir supprimer des redites, qu'elle-même a avouées au commencement de la troisième partie de ses Mémoires.

32. Femme du gouverneur de Pignerol.

33. Voy. les Mémoires de Saint-Simon (t. XX, p. 48 et suiv.) sur les relations de Lauzun et de Fouquet.

34. Les anciennes éditions portent ferré. Il est impossible de lire ce mot. Il y a nuré ou sevré. Ce dernier mot est celui qu'il est le plus facile de lire. Mademoiselle a sans doute voulu dire que Lauzun fut privé de cette société et de ses intrigues.

35. Marie-Louise d'Orléans, fille de Philippe de France, duc d'Orléans, et de Henriette d'Angleterre, fut mariée le 31 août 1679 à Charles II, roi d'Espagne. On raconte que cette princesse était fort triste de ne pas épouser le Dauphin. « Je ne pourrois faire mieux pour ma fille, lui dit Louis XIV. Ah ! répondit-elle, vous pourriez faire quelque chose de plus pour votre nièce. » Cette princesse mourut à Madrid le 12 février 1689. Saint-Simon prétend qu'elle fut empoisonnée.

36. Touron ou tourou.

37. Voy. sur cette princesse d'Harcourt les Mémoires de Saint-Simon, particulièrement le t. IV, p. 53 (édit. Hachette, in-8). Le morceau commence ainsi : « Cette princesse d'Harcourt fut une sorte de personnage qu'il est bon de faire connoître, pour faire connoître plus particulièrement une cour qui ne laissoit pas d'en recevoir de pareils, etc. »

38. Voy. sur le marquis de Los Balbazès les Mémoires de Saint-Simon (même édit., t. XVIII, 423-425).

39. Ce comte de Mansfeld (et non de Mauselle, comme on lit dans les anciennes éditions des Mémoires de Mademoiselle) était ambassadeur de l'empereur Léopold à Madrid.

40. L'hiver de l'année 1680.

41. Anne-Marie-Christine-Victoire, fille de l'électeur de Bavière, mariée à Louis, dauphin, le 7 mars 1680.

42. Charles II, roi d'Angleterre, était mort le 16 février 1685.

43. Mademoiselle revient encore ici sur les événements anciens et dont elle a déjà parlé à leur date, mais rapidement.

44. Année 1675.

45. Voy. les lettres de Bossuet (OEuvres, édit. Lebel, t. XXXVII, p. 82 et suiv.). Il écrivait au roi : « Mes paroles ont fait verser à madame de Montespan beaucoup de larmes, et certainement, Sire, il n'y a point de plus juste sujet de pleurer, que de sentir qu'on a engagé à la créature un cœur que Dieu veut avoir. Qu'il est malaisé de se retirer d'un funeste engagement ! Mais cependant, Sire, il le faut, ou il n'y a point de salut à espérer. » La dignité et la fermeté de ce langage répondent aux plaisanteries des courtisans, dont on trouve l'écho dans lesMémoires de Mademoiselleet surtout dans les Souvenirs de madame de Caylus.

46. Comparez les Mémoires de madame de Caylus et les Lettres de madame de Sévigné. Ce fut au mois d'avril 1675 qu'eut lieu cette retraite de madame de Montespan.

« Les deux amants, dit madame de Caylus, pressés par leur conscience, se séparèrent de bonne foi, ou du moins ils le crurent. Madame de Montespan vint à Paris, visita les églises, jeûna, pria et pleura ses pêchés. Le roi, de son côté, fit tout ce qu'un bon chrétien doit faire. Le jubilé fini, gagné ou non gagné, il fut question de savoir si madame de Montespan reviendroit à la cour. « Pourquoi non ? disoient ses parents et amis, même les plus vertueux ; madame de Montespan, par sa naissance et par sa charge, doit y être ; elle peut y être ; elle peut y vivre aussi chrétiennement qu'ailleurs. » M. l'évêque de Meaux fut de cet avis. Il restoit cependant une difficulté. « Madame de Montespan, ajoutoit-on, paroîtroit-elle devant le roi sans préparation ? Il faudroit qu'ils se vissent avant de se rencontrer en public pour éviter les inconvénients de la surprise. » Sur ce principe, il fut conclu que le roi viendroit chez madame de Montespan ; mais pour ne pas donner à la médisance le moindre sujet de mordre, on convint que des dames respectables et les plus graves de la cour seroient présentes à cette entrevue, et que le roi ne verroit madame de Montespan qu'en leur compagnie, comme il avoit été décidé. Mais insensiblement il l'attira dans une fenêtre ; ils se parlèrent bas assez longtemps, pleurèrent et se dirent ce qu'on a accoutumé de dire en pareil cas. Ils firent ensuite une profonde révérence à ces vénérables matrones, passèrent dans une autre chambre, et il en advint madame la duchesse d'Orléans et ensuite M. le comte de Toulouse.

47. Mademoiselle de Blois (Françoise-Marie de Bourbon) était née le 4 mai 1677. Par conséquent l'histoire que raconte Mademoiselle est antérieure de plusieurs années au mariage du Dauphin.

48. Le comte de Toulouse (Louis-Alexandre de Bourbon) naquit le 6 juin 1678.

49. Le manuscrit porte en beauté; il faudroit lire une beauté, si l'on voulait se rapprocher des habitudes du style moderne.

50. Les anciennes éditions portent : « Où l'on fit la cérémonie du poêle, qui ne se fait qu'à la messe. »

51. Mot espagnol qui a passé dans notre langue et qui désigne une espèce de potage.

52. Cette phrase, depuis car les oilles jusqu'à tout le jour, a été omise dans les anciennes éditions.

 


Mémoires de Mlle de Montpensier, Petite-fille de Henri IV. Collationnés sur le manuscrit autographe. Avec notes biographiques et historiques. Par A. Chéruel. Paris : Charpentier, 1859. T. IV, Chap. I (troisième partie)  : p. 383-414.


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