Chapitre IXSir Thomas Browne PageMademoiselle Page Chapitre XI

Deuxième Partie


CHAPITRE X

(janvier 1670 – 7 mai 1670)

Comme l'on ne sauroit demeurer bien quand l'on y est et que l'esprit de l'homme est changeant, l'ennui de ma condition, quoique heureuse, me prit et l'envie de me marier. Je raisonnois en moi-même (car je n'en parlai à personne) et je me disoit : « Ce n'est point une pensée vague ; il faut qu'elle ait quelque objet ; » et je ne trouvai point que c'étoit. Je cherchois, je songeois et je ne le trouvois point. Enfin, après m'être inquiété quelques jours, je m'aperçus que c'étoit M. de Lauzun que j'aimois, qui s'étoit glissé dans mon cœur : je le regardois comme le plus honnête homme du monde, le plus agréable, et que rien ne manquoit à mon bonheur que d'avoir un mari fait comme lui, que j'aimerois fort et qui m'aimeroit aussi ; que jamais personne ne m'avoit témoigné d'amitié ; qu'il falloit une fois en sa vie goûter la douceur de se voir aimée de quelqu'un, qui valût la peine que l'on aimât. Il me parut que je trouvois plus de plaisir à le voir et à l'entretenir qu'à l'ordinaire ; que les jours que je ne le voyois point, il m'ennuyoit. Je crus que la même pensée lui étoit venue ; qu'il n'osoit me le dire ; mais que les soins qu'il avoit de venir chez la reine, de se rencontrer dans la cour, quand elle sortoit, dans les galeries, enfin partout où l'on se pouvoit voir par hasard, me le faisoient assez connoître.

J'étois ravie d'être toute seule dans ma chambre ; je me faisois un plan de ce que je pouvois faire pour lui, qui lui donneroit une grande élévation ; mais je trouvois que le mérite qu'il avoit pour la soutenir étoit encore au-dessus de tout ce que je pourrois faire. Je me flattois agréablement dans ces pensées et j'étois ravie de voir, par l'estime qu'il avoit dans le monde, que je ne voyois point tout ce que je dis par préoccupation ; mais que c'étoit la vérité. Je me le persuadois et je me souvenois de certains vers de Corneille que j'avois vus autrefois dans une de ses comédies, que je n'ai jamais oubliés, mais que j'envoyai querir à Paris en grande diligence, que j'ai souvent relus depuis, que voici :

Quand les ordres du ciel nous ont faits l'un pour l'autre,
Lise, c'est un accord bientôt fait que le nôtre.
Sa main entre les cœurs, par un secret pouvoir,
Sème l'intelligence avant que de se voir ;
Il prépare si bien l'amant et la maîtresse,
Que leur âme au seul nom s'émeut et s'intéresse.
On s'estime, on se cherche, on s'aime en un moment ;
Tout ce qu'on s'entredit persuade aisément :
Et, sans s'inquiéter de mille peurs frivoles,
La foi semble courir au-devant des paroles.
La langue en peu de mots en explique beaucoup ;
Les yeux, plus éloquents, font tout voir tout d'un coup ;
Et de quoi qu'à l'envi tous les deux nous instruisent,
Le cœur en entend plus que tous les deux n'en disent.1

Ces vers me parurent me convenir admirablement bien. Aussi occupoient-ils souvent ma mémoire et mon esprit et sont-ils bien fortement dans mon cœur. On les peut tourner de toutes les manières. Ils sont chrétiens, quoique d'une comédie. On ne sauroit mieux dire sue la prédestination des mariages ou la prévision de Dieu, qu'ils disent, et on peut trouver là une très-bonne morale et en faire des méditations ; assurément que j'y ai souvent pensé à l'église. Ils sont aussi les plus galants et les plus tendres du monde ; mais à toute chose on y donne le tour que l'on veut, et c'est selon que notre cœur est tourné que nous donnons le tour aux choses. J'ai bien à rendre grâces à Dieu des dispositions qu'il a données au mien et de la manière dont il l'a fait.2 [Je pensois à] l'obligation qu'il m'auroit ; combien cela me seroit glorieux ; ceux qui me loueroient ; ceux qui me blâmeroient ; la douceur de demeurer en mon pays, où il y avoit si peu de gens au-dessus de moi, qui me devoit guérir du regret que je pourrois avoir de n'être pas reine dans des pays étrangers, dont les rois n'étoient pas faits comme M. de Lauzun. Pour les souverains, je trouvois que d'être sujet d'un aussi grand roi que le nôtre valoit bien les souverains. Enfin je me disois un jour tout ce qui me pouvoit donner tout le gré imaginable dans la pensée que j'avois : j'en trouvois à ôter l'espérance à mes héritiers d'avoir mon bien et de souhaiter ma mort, qui étoit bien grand. Un autre jour je cherchois tous les dégoûts que je pouvois et tout ce l'on diroit pour blâmer ce que je voulois faire. Je ne lui parlois qu'en tiers de choses fort indifférentes ; jamais deux mots de suite. Sa vue me persuadoit et détruisoit les résolutions du jour que je ne l'aimois pas.

Comme j'étois souvent avec Madame et qu'elle l'aimoit fort, je mourois d'envie de lui parler de mon dessein, étant persuadée qu'elle l'approuveroit ; mais je n'osois ; je l'y préparois de loin tant [que] je pouvois. Enfin après avoir souvent passé et repassé le pour et le contre dans ma tête, mon cœur décida l'affaire, et ce fut aux Récollets que je pris ma dernière résolution. L'on faisoit une neuvaine aux Récollets pour la canonisation de Saint-Pierre d'Alcantara. La reine y alloit tous les jours ; le saint-sacrement y étoit exposé. Jamais je n'ai été à l'église avec tant de dévotion, et ceux qui me regardoient me trouvoient bien absorbée : car j'étois assurément tout occupée, et je crois que Dieu m'inspira ce qu'il vouloit que je fisse.

Le lendemain, qui étoit le second jour de mars, j'étois fort gaie ; je causois fort avec lui en passant, il me parut fort gai ; je ne sais s'il voyoit ce que j'avois dans le cœur. Je mourois d'envie de lui donner occasion de me dire ce que le sien sentoit pour moi. Je ne savois comment faire. Enfin il me vint un bruit que l'on disoit que le roi rendoit la Lorraine et que le roi me vouloit marier au prince Charles. Je me dis : « Voici une heureuse occasion pour en donner à M. de Lauzun de me parler. » Je l'envoyai chercher à sa chambre. On me dit qu'il n'y étoit pas. Comme il étoit fort ami de M. de Guitry, il étoit souvent à sa chambre. Guitry l'avoit fait accommoder depuis peu d'une manière extraordinaire ; car il l'étoit en tout ce qu'il avoit, et je lui avois dit que je l'irois voir. Je pars de ma chambre disant : « La reine prie Dieu ; j'aurai le temps de voir la chambre de Guitry. » J'y allai ; il n'y étoit pas. En descendant j'entrai chez la reine. Je trouvai M. de Lauzun, qui parloit à la comtesse de Guiche ; je lui dis : « Je suis ravie de vous avoir trouvé ; je vous avois envoyé chercher ; j'ai une vraie affaire à vous [dire]. » La comtesse de Guiche me dit : « Vous l'aurez quand il vous plaira ; mais pour moi, pendant que je le tiens, je vous supplie de me laisser. » Il me dit : « Dans un moment ce sera fait. » Le cœur me battit, et je crois qu'il lui battit bien aussi et qu'il augura par ma mine que je n'avois rien à lui dire que d'agréable. Il me regarda toujours en parlant à la comtesse de Guiche. Au moins me le sembloit-il.

Comme il la quitta, je m'en allai à lui et le menai dans une fenêtre. A sa fierté et à son air, il me parut l'empereur de tout le monde. Je commençai : « Vous m'avez tant témoigné d'amitié depuis quelque temps que cela me donne la dernière confiance en vous, et que je ne veux plus rien faire sans votre avis. » Il me dit, qu'il m'étoit bien obligé de l'honneur que je lui faisois ; qu'il en avoit la dernière reconnoissance ; qu'il voudroit que je visse son cœur et que je verrois que je ne serois point trompée dans la bonne opinion que je lui faisois l'honneur d'avoir de lui. Nous nous fîmes beaucoup de compliments les plus tendres du monde ; puis je commençai : « On dit dans le monde que le roi me veut marier au prince de Lorraine ; en avez-vous ouï parler ? » Il me dit que non, et qu'il étoit persuadé que le roi ne voudroit que ce que je voudrois ; qu'il ne me contraindroit pas. Je lui dis : « En l'âge où je suis, on ne marie guère les gens contre leur gré. Jusqu'ici on a parlé de beaucoup de mariages pour moi ; j'ai toujours écouté tout ; mais au fait et au prendre j'aurois été au désespoir qu'ils eussent réussi. J'aime mon pays, j'y suis si grande dame que mon ambition s'y peut borner, et quand l'on a de la raison, on en doit être content et chercher le bonheur de la vie ; on n'en sauroit avoir avec un homme que l'on ne connoît point. Que s'il n'est pas honnête homme, on ne l'estime pas ; pour moi je ne saurois aimer ce que je n'estime point. » Il me dit : « Vous avez là des sentiments bien raisonnables et qui doivent être approuvés ; mais vous êtes si heureuse ! songeriez-vous à vous marier ? » Je lui dis : « Je suis heureuse véritablement ; mais j'enrage quand j'entends compter les gens qui aspirent à ma succession. — Ah ! dit-il, pour cela, je serois au désespoir, et rien ne me donneroit tant d'envie que cela de me marier. » La reine vint. Il me dit : « Je veux profiter de l'honneur que vous me faites de vous fier à moi, et il y a trop de ;choses à dire sur un chapitre si important pour ne le pas reprendre où on en est demeuré. » Je songeois : voilà un grand pas de fait, et il ne peut plus douter de mes sentiments ; à la première occasion je connoîtrai les siens. J'étois bien contente de moi et de ce que j'avois fait.

Le lendemain, comme la reine eut dîné, il vint à moi et me dit : « On feroit un livre de tout ce qui m'a passé par la tête depuis que je n'ai eu l'honneur de vous voir : j'ai bien fait des châteaux en Espagne. » Je lui dis : « Et moi aussi ; mais ce pourroit être des vérités que tout ce que nous avons pensé. » Il me dit : « Oh ! je ne le crois pas. — Mais parlons sérieusement, lui dis-je ; car tout cela m'importe fort. » Il se mit à rire et dit : « Je serai bien glorieux d'être le chef de votre conseil ; j'aurai bonne opinion de moi. — Et encore plus, lui dis-je, [voyant] que vos conseils seront suivis et point contredits ; car de tout ceci je n'en parlerai à personne. Tout le monde m'est suspect et je suis persuadée qu'il n'y a que vous qui me conseillerez véritablement et sans intérêts que les miens. Venons donc au fait. — Vous demeurâtes, dit-il, que ce qui vous a fait naître la pensée de vous marier est le chagrin que vous avez d'entendre dire : un tel aura une terre ; l'autre une autre. Je le trouve très-juste ; car il faut vivre tant que l'on peut et n'aimer point ceux qui souhaitent notre mort. Car de croire qu'il vous fût venu dans l'esprit : Je me marierai, parce que je trouve quelqu'un qui me plaît, cela ne peut pas tomber dans la pensée, n'y ayant au monde personne qui vous pût mériter. Ainsi je vous trouve assez embarrassée, et je plains l'état où je vous vois, et je vous trouve bien heureuse de m'avoir trouvé pour me décharger votre cœur quelquefois ; car je vois bien qu'il y avoit longtemps que vous cherchiez, sans trouver, quelqu'un digne de l'honneur de votre confiance. Je m'estime le plus heureux de tous les hommes de ce choix et j'ose vous dire que vous vous en trouverez fort bien, et que j'en vais faire mon plaisir et mon unique joie après le service du roi ; ce sera mon application. Il faut sortir de l'état qui vous donne de l'inquiétude. Vous n'avez rien à souhaiter pour la grandeur, pour le bien, l'établissement : tout vous rit sur ces chapitres. On vous estime, on vous honore par votre vertu, par votre mérite, autant que par votre qualité, chose agréable de se devoir cela à soi-même. Le roi vous traite admirablement bien ; il vous aime. Je vois qu'il se plaît avec vous. Qu'avez-vous à désirer ? Si vous aviez été reine, impératrice, vous vous seriez fort ennuyée ; ces conditions-là ont peu d'élévation par-dessus vous et ont plus de peine et moins d'agrément. Demeurez donc toute votre vie ici avec tous les agréments que vous y avez et tous les avantages que vous y possédez. Si vous avez envie de vous marier, vous avez de quoi faire un homme égal en grandeur et en puissance aux souveraines. Il saura par-dessus que vous aurez le plaisir de l'avoir fait ; qu'il vous en aura l'obligation ; il dépendra du roi, qui est en goût pour vous, en tiendra sa grandeur comme de vous ; ce qui vous en est un autre par l'amitié que vous avez pour le roi et par la relation de sa grandeur à la vôtre, dont vous êtes si vivement touchée. Il ne faut point dire comme il faut qu'il soit fait pour posséder un tel honneur ; car en vous plaisant et étant choisi par vous, ce sera un homme admirable. Rien ne lui manquera ; mais où est-il ? Tout ceci est beau ; mais j'ai peur, comme j'ai dit, que ce ne soit un château en Espagne par l'impossibilité de trouver quelqu'un qui vous puisse plaire. » Je me mis à rire. Je crois que la joie avec laquelle je l'écoutois lui en faisoit une grande. Je lui dit : « Tout cela est possible, et je croirai votre conseil. »

Cette conversation dura bien deux heures, et si la reine n'étoit sortie de son oratoire, je crois qu'elle auroit bien duré davantage. J'étois fort contente ; je crois qu'il l'étoit bien aussi. Nous nous parlions en passant quasi tous les jours ; mais il ne venoit guère à moi. C'étoit moi qui allois à lui. A quelques jours de là je lui dis : « Eh bien ? » Il me dit : « J'ai trouvé mille difficultés. » Notre conversation détruisoit absolument la chose : il ne me fit voir ce jour-là que des dégoûts, que des difficultés. Elle ne me plut pas ; mais elle ne fit point d'effet. Je voyois bien qu'il ne pensoit pas ce qu'il me disoit et que c'étoit pour voir ce que je dirois.

Les conversations que nous eûmes ensuite étoient assez éloignées. Nous ne nous parlions que les huit ou quinze jours ; depuis elles le furent bien davantage. Je lui dis : « J'ai bien songé à ce que vous m'avez dit ; mais je trouve remèdes à tout, » et je [les] lui disoit. Nous revenions, et il me disoit : « Si je n'entre pas toujours dans votre sens et que je vous contrarie, ne vous rebutez pas de moi : C'est que je vous parle sincèrement et que je ne vous veux pas flatter dans une chose où il y va de votre salut, du repos de votre vie. Je vous en vas bien dire qui ne sont pas gracieuses et qui vous déplairont peut-être : c'est que je trouve que vous avez raison de prendre un parti, rien au monde n'étant si ridicule, de quelque qualité que l'on soit, que de voir une fille de quarante ans, habillée dans les plaisirs, dans le monde, comme une de quinze qui ne songe à rien. Quand l'on est à cet âge, il faut ou se faire religieuse ou dévote ou habillée, modestement, n'aller à rien. A cause de votre qualité, vous pourriez une fois, pour faire votre cour, aller à un Opéra, encore ne faudroit-il pas que ce fût tout le temps, et vous en faire bien prier ; ne témoigner pas être aise ni y prendre plaisir, ne louer rien, par l'inapplication que vous y auriez ; aller à vêpres, au sermon, au salut, aux assemblées des pauvres, aux hôpitaux, ne s'acquitter des devoirs envers la reine, où votre qualité vous oblige, qu'en pareilles occasions, ou bien vous marier ; car l'étant, à tous les âges on va partout ; on est habillée comme les autres, pour plaire à son mari. On va aux plaisirs, parce qu'il veut que l'on fasse comme les autres ; mais ce mari me paroît une chose bien difficile à trouver ; et peut-être quand on l'auroit trouvé à sa fantaisie, auroit-il des défauts qui vous rendroient malheureuse ? C'est pourquoi on ne sait que dire là-dessus. »

Nous demeurâmes-là ; car il arrvoit toujours quelqu'un qui nous interrompoit, ou la reine sortoit. Il ne venoit point à ma chambre, et je n'osoit lui dire d'y venir étant persuadée qu'il savoit bien ce qu'il faisoit. Je n'étois point embarrassée sur le choix des partis : je trouvois qu'il avoit raison en ce qu'il disoit, qu'il en falloit prendre un des trois, et il me paroissoit que connoissant mes intentions, il ne devoit pas me dire directement : « prenez-moi ; » que c'étoit à moi à l'entendre et que je comprenois fort bien, et qu'il me faisoit grand plaisir. J'aurois voulu qu'il m'eût parlé plus clairement, ayant assez de hâte de finir l'affaire ; mais j'ai connu depuis quels égards il avoit pour moi et combien je lui devois être obligée de la modération que tout autre que lui n'auroit pas eue en une occasion, où il y alloit d'une belle fortune que l'on ne hasarde guère pour la laisser trop traîner.

Revenons à la cour. Monsieur et Madame eurent un sérieux démêlé. L'absence du chevalier de Lorraine rendoit Monsieur fort chagrin. Un jour que la reine avoit été saignée, en sortant de chez la reine, elle alla chez les dames (car on ne disoit plus chez madame de La Vallière ; elle commençoit dès lors à n'être plus que la suivante de madame de Montespan) ; on le vint dire à la reine. La reine jugea qu'il y avoit quelque chose. Le lendemain Madame lui en parla. Monsieur fit un vacarme horrible ; je ne me souviens plus sur quoi ; lui ramena tout ce qu'il lui avoit pardonné et qui étoit passé. La reine alla le soir d'après à Paris. Madame y vint avec elle, qui conta ses douleurs à la reine avec tant d'honnêteté, que la reine, qui ne l'avoit jamais aimée, la prit en amitié.

Le soir, comme on revint, Monsieur parla à la reine ; puis, comme elle alla jouer, il me prît dans une fenêtre et me dit rage de Madame. Je m'en allai fermer la porte. Enfin il me dit qu'il ne l'avoit jamais aimée que quinze jours, et me conta des choses qui m'étonnoient comme il les pouvoit dire. Je lui disoit : « Ah ! Monsieur, songez que vous en avez des enfants ; que c'est une jeune créature qui a pu manquer dans les choses extérieures, mais qui n'est point coupable ; qu'elle reviendra, et que vous serez au désespoir de tout ce que vous m'avez dit. » Enfin je fis tout ce que je pus pour le radoucir. Madame me disoit le lendemain : « Si quand j'ai fait quelque faute, il m'avoit étranglée, il auroit bien fait ; mais il m'a pardonné et me vient tourmenter pour rien. » Elle se plaignoit fort, de son côté, de sa manière de vivre, mais avec une grande sagesse, hors un peu de mépris, dont elle se fût [bien] passée ; car cela est désagréable à un mari, quand il le sait. Enfin les choses, à force d'aller mal, allèrent bien : on les raccommoda. Le roi, à la prière de Madame, mit le chevalier de Lorraine hors de prison, et on l'envoya en Italie ; de sorte que Monsieur prit d'autres airs avec Madame ; mais je crois qu'ils ne vécurent guère mieux ensemble.

On parla de faire un voyage en Flandre ; et quoique l'on eût la paix, le roi ne marchoit point sans corps d'armée. Le roi déclara que M. de Lauzun la commanderoit. J'étois à Paris ; on me dit cette nouvelle, qui me fit un sensible plaisir, et quand je lui fis mon compliment, il me dit : « J'ai bien cru que cela vous feroit un vrai plaisir. » J"avois accoutumé de venir la semaine sainte ici, et d'y être quinze jours ou trois semaines ; cette année-là je ne parlois point d'y venir, et tous mes gens demandoient : « quand part-on ? » On me rendoit compte de ce que je faisois faire ici. Cela m'étoit fort indifférent : on en étoit étonné. La semaine sainte, je me résolus pourtant de m'en aller le vendredi saint, après ténèbres, à Paris pour y passer Pâques, et comme le roi et la reine y devoient venir le mardi, M. le Dauphin devant être parrain de mademoiselle de Valois avec moi, j'y demeurai jusque-là. Le vendredi, avant que de partir, en attendant ténèbres, nous causâmes longtemps : nous ne parlâmes que de dévotion ; il en parloit à merveille, comme de tout ce qu'il lui plaisoit ; car il est naturellement éloquent, n'ayant nulle étude. Il me dit : « Avouez que vous vous allez ennuyer à Paris. » J'en convins. Je lui dis adieu.

Je m'en allai la veille de Pâques ; je sollicitai un procès ; madame de Rambures y vint avec moi, qui me parla toujours de lui ; cela me fit un grand plaisir. Le lendemain de Pâques, je le trouvai dans la rue ; il faut savoir la joie que j'eus, et celle qu'il me parut avoir, d'un carrosse à l'autre, en passant.

Leurs Majestés vinrent le mardi au baptême ; ils dînèrent chez Monsieur, et je m'en retournai avec eux. Je contai à M. de Lauzun l'ennui que j'avois eu à Paris, et il me disoit : « Mais autrefois vous ne vous y ennuyiez point ; d'où vient cela ? Cherchons-en la raison. C'est que vous n'aviez rien dans la tête, et que vous y avez quelque chose et ce quelque chose vous n'en oseriez parler qu'à moi ; ainsi vous vous ennuyez de ne me pas voir. Cela m'est bien honorable, si on le savoit sans en savoir la raison ; car dès que l'on la sauroit, on sauroit bien que je n'y ai nulle part.3 » Il badinoit ainsi avec moi.

Avant le voyage, je fus à Paris trois ou quatre jours pour y faire des remèdes. Un jour que j'avois été saignée, madame d'Épernon étoit chez moi, madame de Puysieux et madame de Rambures. Madame de Puysieux en me regardant dit : « Ce seroit là une belle et bonne femme ; heureux seroit celui qui l'auroit. » Madame d'Épernon dit : « Personne ne sera cet heureux ; car je ne crois pas que Mademoiselle se marie. Elle ne l'a pas voulu être à des rois ; à qui le pourroit-elle être ? » Madame de Puysieux dit : « Ce n'est pas avec des rois que l'on est toujours heureux. N'est-il pas vrai, grande princesse ? » C'étoit une femme qui avoit des manières toutes particulières, et surtout celle de se faire craindre et honorer de tout le monde. Je répondis : « Je ne sais ce que c'est que d'être heureuse. Si je croyois l'être en me mariant, je me marierois dès demain, tant je suis lasse de n'avoir jamais eu que du chagrin en ma vie. » Madame d'Épernon dit : « Ah ! je ne le crois pas. — Pourquoi ? pour être heureuse que ne fait-on pas ? » Madame de Puysieux dit : « Épousez M. de Longueville (l'aîné s'étoit fait prêtre, et avoit donné tout son bien au comte de Saint Paul, de sorte que l'on l'appeloit ainsi4). C'est un fort honnête homme, beau, bien fait, brave, riche, qui reconnoîtra fort bien l'honneur que vous lui ferez. Vous croyez bien que madame de Longueville sera toujours à vos pieds. Assurément vous serez heureuse. Mademoiselle votre sœur a bien épousé M. de Guise ; il n'est pas aîné comme M. de Longueville ; ils n'ont pas épousé tant de princesses du sang de suite ; il n'est pas si riche ni si honnête homme ; mais il est juste que vous ayez mieux que votre sœur. » Madame d'Épernon dit à madame de Puysieux : « Que dites-vous ? Puisque l'on est en train de proposer, pourquoi Mademoiselle n'épouseroit-elle pas aussi bien mon neveu de Marsan ?5 » Je me récriai : « Ah ! pour cela, il y a de la différence du dernier cadet de Lorraine à M. de Longueville et de madame votre sœur à une princesse du sang. » Madame d'Épernon dit d'un ton chagrin : « Je m'étonne que vous preniez plaisir à ces sortes de contes. » Je lui dis en riant : « Ni Dieu ni le prochain n'y sont offensés. » Il vint du monde ; on changea de discours. Pour moi qui avois mon dessein dans la tête, je n'étois pas fâchée que le bruit courût que l'on parloit de me marier à M. de Longueville ; il me sembloit que c'étoit en quelque façon accoutumer les gens à ce que je voulois faire.

Je demeurai le moins que je pus à Paris, où je m'ennuyois furieusement ; je n'en cherchois plus la raison et je mourois de peur que l'on ne la devinât. Je ne revins plus à Paris qu'un petit tour devant le voyage. En m'en retournant je trouvai l'équipage de M. de Lauzun, qui partoit. Il tenoit toute la rue Saint-Honoré ; il étoit très-beau et magnifique. Je pensois : l'année qui vient il sera encore plus beau. Je lui dis que je l'avois rencontré et comme je l'avois trouvé ; il sourit.

En partant,6 on fut coucher à Senlis, et le lendemain à Compiègne,7 où je causai un peu avec lui : mais Guitry fut toujours en tiers. Je lui demandai : « Quand vous serez à la tête de votre armée, ne viendrez-vous plus ici ? » Il me dit qu'il y viendroit le plus souvent qu'il pourroit. Le lendemain, à Noyon, je lui parlai un peu sans tiers ; je lui dis : « Mes affaires demeureront-elles là ? Ne saurai-je qu'au retour de la campagne quel parti prendre ? Me laisserez-vous dans l'embarras dont vous m'avez dit avoir tant de pitié ? » Il me disoit : « Il ne faut songer qu'au voyage. » Pendant que la reine jouoit, le roi se promenoit dans le jardin ; j'étois à la fenêtre ; le roi me disoit : « Vous ne venez point vous promener ici. » Je mourois d'envie d'y aller ; mais la reine auroit grondé. Je me contentai de parler à lui à tous les tours qu'il faisoit, et quelque mot en passant à M. de Lauzun, qui regardoit plus du côté de la fenêtre que de celui des gens à qui il parloit. Il monta chez la reine avec le roi et me dit qu'il partoit de grand matin pour aller assembler les troupes qui devoient arriver. Il vint au-devant du roi à un quart de lieue de Saint-Quentin, fort ajusté, avec beaucoup d'officiers qui le suivoient. Je tournai fort la tête pour le regarder ; car il étoit du côté du roi, et moi j'étois du côté de la reine.

Le jour que l'on séjourna à Saint-Quentin,8 j'allai à la messe avec la reine. Quoique j'y allasse assez souvent, le roi me dit : « Au voyage, où on aura quantité d'étrangers, je serai bien aise que la reine soit bien accompagnée. Je vous prie, ma cousine, d'être tous les jours à la messe avec elle et de la suivre partout. » Je trouvai en entrant M. de Lauzun, qui étoit dans l'antichambre, paré et ajusté. Rochefort y étoit aussi, qui mouroit de jalousie contre lui. Je leur fis la révérence, et j'appelai Rochefort et je lui dis : « On n'ose pas s'approcher d'un général d'armée. » Il vint à moi riant ; nous causâmes un moment, Rochefort, lui et moi, tout haut. Le roi fut l'après-dînée au camp. J'étois à la fenêtre de la reine. M. de Lauzun partit un peu devant. Je vis avec plaisir M. de Soubise venir recevoir quelque ordre de lui ; il ôta son chapeau, le remit, et M. de Soubise avoit le sien à la main. Cet air d'autorité lui seyoit fort bien. S'il eût vu que je le voyois, je crois que cela lui auroit fait plaisir ; mais il l'eut le soir de le savoir ; je ne manquai pas de lui dire.

On partit le lendemain de Saint-Quentin à sept heures du matin par un temps effroyable.9 On fit un très-mauvais dîner, étant un samedi qu'il n'y avoit point de poisson ni même de beurre frais ni d'œufs : le pain n'étoit pas cuit, et si on ne laissa pas d'être d'une grande gaieté.10 Pour moi, tout me plaisoit : ce voyage me paroissoit être fait pour moi ; je croyois que tout le monde ne songeoit qu'à me plaire, comptant M. de Lauzun pour tout et tout le reste pour rien, hors le roi, qui a toujours été devant toute chose pour moi. Et quand je n'aurois pas eu ces sentiments nés avec moi, il me les auroit inspirés, tant il les a fortement dans le cœur.

Nous trouvâmes des chemins épouvantables, des chevaux morts, des mulets déchargés, étant tombés dans des boues ; des charrettes embourbées, enfin tous les désordres qu'un mauvais temps peut causer à des équipages.11 Ce qui me déplaisoit fort, c'est qu'il étoit à cheval et qu'il étoit fort mouillé.12 A la fin de la journée, le roi se plaignoit de la longueur et des méchants chemins. J'avois peur que l'on ne s'en prît à M. de Lauzun et que l'on l'accusât de peu de prévoyance ; mais le roi dit que c'étoit M. de Louvois qui avoit fait la route.

Comme nous fûmes proche de Landrecies à une heure de nuit,13 le fils de Roncherolles, qui en étoit gouverneur, vint dire que la rivière étoit tellement grossie que l'on avoit peine à y passer au gué14 ; que Bouligneux y avoit pensé être noyé, et qu'il étoit monté sur l'impériale de son carrosse. Il conta encore force choses de cette nature, pour montrer le peu de sûreté qu'il y avoit de penser au gué. On dit qu'il y en avoit un autre à une lieue fort sûr. A peine avoit-on des flambeaux. On en passa deux ou trois. Devant que d'aller à la rivière, le roi monta à cheval. La reine en avoit fort peur et moi aussi. Comme je crains l'eau, dès que je la vois je ne sais plus ce que je fais : je criai fort. La reine fut en inquiétude de ses femmes, moi des miennes, de mes filles, qui étoient dans mon carrosse avec mes pierreries. Enfin on faisoit grand bruit, [qui] faisoit peine au roi. Comme l'on vit que l'on ne pouvoit passer on retourna au grand chemin ; on trouva une méchante maison dans un pré ; la reine mit pied à terre. Il étoit dix heures. On avoit une bougie. La reine voulut passer dans une autre chambre (il y en avoit deux) ; madame de Béthune qui l'éclairoit, lui aidoit. Je portois sa queue en la suivant ; j'enfonçai jusqu'au genoux dans la terre. La reine disoit : « Ma cousine, vous me tirez. » Je lui disois : « Madame, je suis enfoncée dans un trou ; attendez que je m'en retire. » Je me trouvai toute mouillée, et tout cela sécha sur moi. La reine étoit fort inquiète. Le roi dit : « Il faut attendre le jour et se reposer dans les carrosses. » On les détela ; je fis accommoder le mien avec les carreaux des autres. Je mis un bonnet, des cornette sur ma tête et ma robe de chambre par-dessus mon habit ; je me délaçai un peu. Je ne pus dormir : car c'étoit un bruit effroyable.15

J'entendis la voix de Monsieur ; j'envoyai voir où il étoit. On me répondit que son carrosse étoit assez près, et que Madame et madame de Thianges étoient avec lui, qui me mandoient de leur aller faire une visite. Je m'y fis porter. Madame, qui étoit délicate et qui ne se portoit pas fort bien, étoit abattue. Madame de Thianges causoit. Monsieur parloit au marquis de Villeroy et lui disoit : « Pour rien je ne me montrerois à tous comme étoit M. de Lauzun tantôt : Il n'avoit pas bon air avec ses cheveux mouillés ; jamais je n'ai vu un homme si affreux. » Le marquis de Villeroy y répondit sur le même ton, et moi je pensois : « Et moi je le trouve fort bien en quelque état qu'il soit, et il ne se soucie guère de vous plaire et je crois qu'il sait bien qu'il me plaît. » Monsieur ne l'aimoit pas. Le marquis de Villeroy avoit eu un démêlé avec lui autrefois ; je crois que c'étoit pour madame de Monaco,16 et M. de Lauzun en avoit usé avec une grande hauteur avec lui. Depuis ils n'avoient eu nul commerce ensemble.

Je m'ennuyai là et m'en retournai à mon carrosse. On vint dire : « Voilà le roi et la reine qui vont manger. » On mouroit de faim. Je me fis porter ; car il étoit impossible, à moins que d'être bottée, d'aller dans la boue. Je trouvai la reine fort chagrine, qui disoit qu'elle seroit malade si elle ne dormoit point : quel plaisir de faire de tels voyages ! Le roi lui dit : « Voilà que l'on vient d'apporter des matelas ; Romecourt a un lit tout neuf sur quoi vous pourrez dormir. » Elle dit : « Cela seroit horrible : Quoi ! coucher tous ensemble ! » Le roi dit : « Quoi ! être sur des matelas tout habillés, il y a du mal ? Je n'y en trouve point. Demandez à ma cousine ; on peut s'en rapporter à elle et faire ce qu'elle dira. » Je ne trouvai pas qu'il y eut rien à dire d'être dix ou douze femmes dans une chambre avec le roi et Monsieur. La reine y consentit.

Le roi descendit pour donner ordre à tout : on apporta à manger. Ce repas venoit de Landrecies : il y avoit un potage sans viande dessus. La reine dit qu'il avoit mauvaise mine ; qu'elle n'en vouloit point. Il étoit si froid qu'il auroit figé, s'il avoit été assez cuit ; mais le bouillon étoit fort maigre. Le roi commanda que l'on en mangeât avec lui, de sorte que Monsieur, Madame et moi nous nous mîmes à l'expédier avec une grande diligence, par l'avidité que causoit un grand besoin de manger. Quand il n'y eut plus rien, la reine dit : « J'en voulois, et l'on a tout mangé ; » et se fâcha un peu. On avoit assez envie de rire ; mais ou nous apporta un plat, où il y avoit du rôti de toutes sortes de viandes de fort mauvaise mine, [si] dures, que l'on prenoit un poulet à deux par chaque cuisse et on avoit peine en le tirant de toute sa force d'en venir à bout. Le repas se passa de cette manière. Puis on fut dans cette chambre, où on avoit fait du feu. La reine se mit sur le lit qui étoit au coin du feu, tournée de manière qu'elle voyoit dans toute la chambre. Le roi lui dit : « Vous n'avez qu'à tenir votre rideau ouvert ; vous nous verrez tous. » Madame de Thianges et madame de Béthune étoient auprès du lit de la reine sur un matelas ; ensuite il y en avoit trois tout auprès les uns des autres, la place empêchant qu'il pût y avoir de distance : Monsieur étoit le premier, Madame, le roi, moi, madame de La Vallière et madame de Montespan ; un autre en tournant où étoient madame la duchesse de Créqui, la marquise de La Vallière et une des filles de la reine, La Marck. Le roi et Monsieur mirent comme nous leurs robes de chambre par-dessus leurs habits et leurs bonnets de nuit, et on avoit quelques couvertures et des manteaux. Dans la chambre derrière étoient les grands officiers du roi [et] M. de Lauzun. On venoit à tout moment le demander. Enfin le roi dit : « Faites un trou à l'autre chambre, afin de pouvoir donner vos ordres, sans passer ici. » En passant une fois, il fallut sauter par le coin d'un des lits ; il accrocha un de ses éperons à la coiffe de la marquise de La Vallière ; cela fit rire tout le monde, hors la reine. Puis tout d'un coup madame de Thianges se mit à dire en entendant des vaches et des ânes, qui étoient dans une étable derrière nous : « Voici qui me donne de la dévotion me faisant souvenir de la naissance de Notre-Seigneur. » De voir le roi dans une étable comme lui, cette pensée auroit pu donner véritablement de la dévotion, et la comparaison étoit assez juste ; mais elle l'exprimoit d'une manière à faire rire. A cela la reine rit ; ce qui fit plaisir au roi, qui étoit fâché de la voir gronder. On s'endormit.

A quatre heures, M. de Louvois vint à la porte et alla réveiller un aide-major : « Le pont est fait, [lui dit-il] ; il commence à faire jour ; il faudroit le dire au roi. » Il répondit que l'on dormoit. Je l'entendis et crus qu'il valoit mieux gagner la ville et dormir dans un lit, puisque l'on le pouvoit. Je dis au roi : « Sire, voilà M. de Louvois. » Le roi le fit entrer ; on se leva. On peut juger comme tout le monde étoit fait : car les dames, qui mettent beaucoup de rouge, sont plus pâles le matin que les autres, et de n'avoir point dormi. J'étois la moins défigurée. Je suis forte et quasi toujours rouge, quand je m'éveille. On monta en carrosse et on alla droit à l'église. Après avoir entendu la messe, la reine se coucha ; elle prit un bouillon. Il en restoit dans le pot, que j'avalai. Je n'avois personne ; j'étois fort embarrassée où aller. On me vint dire : « Il y a là un carrosse qui vous attend. » Je fus fort aise. Je demandai à qui il étoit. On me dit : « C'est madame Chetrupe, femme d'un capitaine Suisse qui est ici, qui vous l'envoie. » Je montai dedans. Il me mena à mon logis où je trouvai à dîner prêt et ma chambre tendue, et je n'avois point de femmes ni de hardes pour me coucher. Je trouvai M. de Rambures qui étoit là en garnison, à qui je demandai qui étoit cette madame Chetrupe, qui avoit eu tant de soin de moi. Il me dit que c'étoit une des filles de madame de Carignan qui avoit épousé un capitaine Suisse, nommée Fontaine. Je la connoissois et vis par là combien il est utile d'avoir des connoissances. Mes femmes arrivèrent ; je me couchai à sept heures. En m'éveillant à trois ou quatre, je me trouvai dans la plus vilaine chambre du monde, que je n'avois pas eu le loisir de considérer le matin, tant j'avois envie de dormir. Mes filles me dirent : « Nous sommes bien en colère contre M. de Lauzun : il a fait passer vos femmes sur le pont une heure devant nous ; il a fiat défiler des troupes ; les a envoyé chercher. » Je leur dis : « Il n'a pas tort ; il a jugé que j'en avois besoin pour me coucher et que je dormirois plus tôt. Je lui sais bon gré de ce soin. » Il n'y avoit occasion où il me pût marquer son application pour ce qui me regardoit, qu'il ne [le] marquât. Dès que je fus habillée, je m'en allai chez la reine où il venoit. Il me gronda fort de quoi j'avois témoigné de la peur ; que cela avoit fait peine au roi ; que pour lui cela lui en avoit fait beaucoup ; que je m'étudiasse à l'avenir. Enfin il me donna mille leçons dont j'ai tâché de profiter pour avoir plus de complaisance pour le roi. Je lui dis les inquiétudes où j'étois de ces mauvais chemins, de celle où je le voyois. On peut juger comme il reçut tout cela.

On séjourna un jour ou deux à Landrecies17 pour laisser reposer les troupes et les équipages. Le roi alla à Avesnes dîner.18 On laissa tous les équipages ; même beaucoup de gens de la cour demeurèrent. Je laissai mes filles et tout mon équipage. En sortant, nous trouvâmes un régiment de dragons qui s'en alloit et passoit à Landrecies. Je n'en avois jamais vu et j'en avois fort entendu parler à M. de Lauzun, qui les aimoit fort. Quelque pluie et vent qui donnassent au nez, je les regardai tant que je pus et les louai et admirai fort. Je trouvai occasion de parler à M. de Lauzun, que le roi appela, pour lui dire que je les trouvois jolis ; que j'étois si aise de les voir ; que je n'en avois jamais vu. Le roi loua la bonté de ces troupes ; comme elles étoient utiles, tout ce qu'elles faisoient, leur manière de combattre à pied et à cheval, les belles actions qu'elles avoient faites et comme c'étoit M. de Lauzun qui les avoit mises sur ce pied-là et qu'elles n'avoient jamais rien fait que par ses ordres ou avec lui. C'étoit le louer indirectement. Les louanges du roi de cette manière ne sont pas une chose mal agréable pour ceux à qui il les donne et pour ceux qui s'y intéressent. J'avois souvent de ces contentements : car le roi parloit souvent à lui dans le carrosse, l'appeloit à tout moment pour lui donner quelque ordre. Il prévoyoit ce qu'il feroit pour dire qu'il étoit le plus soigneux homme du monde, qui entendoit le mieux les choses, qui les exécutoit d'une manière toute différente des autres. Enfin tout ce qui peut faire plaisir à dire, le roi le disoit pour lui, et m'en donnoit de grands, et me sembloit qu'il l'aimoit autant que moi, et je l'en aimois mille fois mieux, et la tendresse que j'ai pour le roi m'avoit assurément inspiré celle que j'avois pour M. de Lauzun et son bon goût m'y en avoit fait trouver à tout ce qu'il faisoit.

M. de Lauzun lui parla en faveur d'un major nommé La Motte, qui vouloit avoir permission de vendre sa charge, et M. de Lauzun le mettoit brigadier dans sa compagnie. Il en parla au roi avec des bontés pour cet homme, [telles] que je n'étois pas étonnée s'il étoit adoré parmi tous les officiers, voyant de quelle manière il parloit au roi pour eux. Le roi en fit quelque difficulté. M. de Lauzun le pressa d'une manière qui me fit plaisir, parce qu'il me parut qu'il parloit au roi d'une manière libre et respectueuse qui faisoit connoître qu'il sentoit bien comme étoit le roi pour lui. Le roi lui parloit avec une amitié dont j'étois ravie ; il étoit à cheval et étoit très-proche du roi. Personne n'entendit cette conversation ; car ils parloient bas ; mais quand l'on aime bien les gens et que l'on n'est appliqué qu'à eux, l'on entend de loin et surtout les choses qui nous plaisent. Il fit un temps effroyable ce jour-là. M. de Lauzun étoit à tout moment sans chapeau et se mouilloit fort la tête. Je disois au roi : « Sire, commandez-lui de mettre son chapeau ; cela le fera malade. » Enfin je le dis si souvent que j'eus peur que l'on le remarquât. La crainte que j'avois qu'il ne couchât au camp, si les troupes campoient, qui avoient laissé tout leur équipage, me fit dire au roi : « Sire, Votre Majesté devroit avoir la bonté de faire entrer les troupes dans la ville. Tous les chevaux mourront, s'ils ne sont à couvert, et cette journée ruinera plus les troupes qu'une grande marcher par le beau temps. » Le roi trouva que j'avois raison, et le soin que j'avois de M. de Lauzun leur valut cela.

Le roi dîna dans une maison bourgeoise, et puis on fut à la maison du gouverneur ; il n'y a point de château [à Avesnes]. Je demeurai toute la journée chez la reine. Le soir, comme la reine commençoit à jouer, M. de Lauzun entra dans sa chambre ; j'étois à une fenêtre, souhaitant fort qu'il vînt ; il y avoit longtemps que je ne l'avois entretenu ; il entra avec le comte d'Ayen, poudré, ajusté. Je leur dis : « Vous venez très à propos, messieurs, pour m'entretenir ; je m'ennuyois fort toute seule. » M. de Lauzun dit : « Pour moi, je ne serai ici qu'un moment ; il faut que je retourne à mon ambassadeur. » C'est que M. Morosini, ambassadeur de Venise étoit fort de ses amis ; il l'avoit connu à Venise. Comme c'étoit un jeune homme, fort du monde, il avoit désiré de suivre le roi à ce voyage, où les autres ambassadeurs n'étoient pas venus. Il étoit quasi comme inconnu ; n'ayant point d'équipage, il alloit dans celui de M. de Lauzun, logeoit chez lui, même au camp.

Je me doutois bien, quoiqu'il dît, qu'il seroit plus longtemps qu'il ne disoit ; car en disant : « Il faut que je retourne à mon ambassadeur, qui est tout seul, » il se mit en conversation. Le comte d'Ayen étoit en tiers. Il commença par être honteux d'être ajusté19 ; mais que son habit étant mouillé, il n'en avoit point trouvé d'autre ; que ses cheveux l'étant aussi, il avoit fallu mettre de la poudre, que les gens sans dessein, comme lui, et aussi vieux qu'il étoit, ne s'ajustoient plus ; qu'il ne venoit jamais chez la reine, n'y ayant que faire ; mais que le hasard l'y avoit fait entrer. Je lui dis : « Vous en repentez-vous, puisque vous m'êtes bon à quelque chose ? — Non, dit-il ; mais je ne le serai pas longtemps ; car je m'en irai. » Le comte d'Ayen, qui connoissoit ses manières extraordinaires et qui ne savoit pas pour quoi il contoit tout cela et que c'étoit peut-être pour qu'il allât redire : « Vraiment M. de Lauzun est un homme bien particulier ; il vient de dire telle chose à Mademoiselle ; » le comte d'Ayen donc, de bonne foi, lui dit : « Mais je pense que vous êtes fou de parler de cette manière à Mademoiselle. — Mois, je ne suis point flatteur ; je dis ce que je pense. Mademoiselle commence à me connoître assez pour savoir comme je suis fait. » Je riois à tous ces beaux discours. Je ne sais si M. de Lauzun croyoit que j'avois ouï dire le sot bruit qui avoit couru dans le monde qu'il vouloit épouser la duchesse de La Vallière, et si cela ne me faisoit pas de peine. Comme le comte d'Ayen fut parti, nous commençâmes par le temps ; il me fit un remercîment pour les troupes du soin que j'avois eu de les faire entrer dans la vile et que j'avois fait connoître par là la bonté de mon cœur, la charité de compatir aux maux d'autrui. C'étoit un champ à dire de jolies choses : aussi s'en acquitta-t-il fort bien ; mais ce ne sont pas de celles qu'il faut redire. En pareilles rencontres, il suffit de les sentir et de les connoître ; elles ne toucheroient pas les autres et seroient un sujet de raillerie. Je lui dis : « Je ne trouve rien de si agréable que de commander une armée. En temps de paix, on n'en peut pas commander une plus grande ; et pour moi qui crains pour mes amis, j'aime mieux vous voir à la tête de celle-ci que d'une plus grande. » Comme cela ne répondoit pas à son inclination, il me dit : « Ce que vous dites fait pitié ; vous en devriez avoir de moi de ne faire pas un autre personnage. Ce n'est pas que ce ne soit au-dessus de moi, quelque commandement que ce puisse être, par la manière dont le roi me l'a donné ; mais comme il faut marcher à ses troupes, y être les soirs, les matins, que cela m'ôte mille moments que je voudrois mieux employer, j'enrage d'y être. » Je lui disois : « Mais à quoi les mieux employer ? dites à quoi. » Il ne répondit rien.

Il me disoit : « En l'état où je suis, je suis plus prêt à m'aller jeter dans quelque ermitage qu'à demeurer dans le monde ; j'y entrevois de si belles et de si grandes espérances ! et si elles me manquent, je mourrai de douleur ; je ferois mieux de les prévenir par une telle retraite. Tout le monde diroit que je suis un fou, et je trouverois bien que je ne le suis pas. » Je lui disois : « Moi qui vous confie toutes mes affaires, faites-moi un peu part des vôtres. » Il me répondit : « Je n'en ai point. » Je lui demandois : « Mais ne songerez-vous jamais à vous marier, et n'avez-vous point eu de vues en votre vie pour cela ? » Il me disoit : « Non ; quand l'on m'en a voulu donner, je m'en suis toujours éloigné, et la seule chose à quoi je songerois si je me voulois marier, ce seroit à la vertu de la demoiselle : car s'il y avoit la moindre faute, je n'en voudrois pas ; fut-ce vous, qui êtes au-dessus de tout. Si je vous pouvois épouser et que l'on eût dit quelque chose de votre réputation et que vous ne me plussiez pas par votre personne, je ne voudrois jamais. » Je lui disois : « Dites-vous bien vrai ? Car si cela étoit, je vous aimerois encore mieux. — Oui, je vous le dis, et rien ne me choqueroit davantage que d'entendre dire que je voulusse de quelque personne dont la vie ne seroit pas telle que la doit avoir une honnête fille. J'aimerois mieux épouser votre femme de chambre, si je l'aimois ; je ne verrois plus le monde ; je m'enfermerois dans mon logis et y vivrois avec honneur. » Je lui disois : « Mais vous voudriez bien de moi ; car je suis sage, et je n'ai rien qui vous déplaise. — Ne faisons point de contes de Peau-d'Ane, quand nous parlons sérieusement. — Mais revenons donc à moi ; quand me permettrez-vous de prendre une résolution et de sortir de l'état que vous me dites tous les jours qui vous fait pitié ? — Vous ne songez pas que mon ambassadeur m'attend. »

Rochefort entra comme nous étions auprès de la porte ; il lui dit : « Vous arrivez tout à propos pour entretenir Mademoiselle ; vous le ferez plus agréablement que moi. » Je lui20 contai que je l'avois entendu à deux heures après minuit, qui passoit devant mes fenêtres à Landrecies avec les troupes ; que quand les trompettes m'avoient éveillée, je les avois bien maudites ; mais que quand je l'avois entendu parler, j'avois eu pitié de le savoir à la pluie, et que je pensois : « Je suis plus heureuse que lui, quoique je ne dorme pas ; il ne me fait pas plaindre. Il est plus à plaindre que moi ; il a la pluie sur le dos. » Il me paroissoit fort content de lui aussi bien que de moi, lorsqu'il voyoit que j'en étois si occupée. Il demeura encore une heure à causer avec Rochefort, avec toute son impatience de s'en aller. Il avoit été deux ou trois heures à causer avec moi.

Rochefort me demanda : « Y a-t-il longtemps que vous êtes avec M. de Lauzun. » Je lui dis : « Il y a une heure. — Il ne vous a pas ennuyée ; car vous tirez parti de toutes sortes de gens. Quand il veut, il a de l'esprit ; ce n'est que belle malice qui lui fait conter des fagots que l'on n'entend point. — Il a ses raisons. — Que vous a-t-il dit aujourd'hui ? » Je causois beaucoup avec Rochefort, afin que l'on ne s'aperçût pas que je causois avec M. de Lauzun. Je le connoissois du temps qu'il étoit à M. le Prince.21 Je lui dis : « Il m'a conté qu'il quitteroit un de ces jours la cour pour se faire ermite, et ce chapitre a quasi toujours duré. — J'admire cet homme de vous conter de telles choses. » Je me mis à parler de sa conduite, comme d'un homme sur lequel je lui faisois des questions. J'avois fort envie de savoir sa vie, et je savois ne me pouvoir mieux adresser qu'à Rochefort ; il m'en dit tous les biens du monde : il ne croyoit pas qu'il eût une galanterie ; qu'il étoit fort retiré ; qu'il ne voyoit plus de femmes ; qu'il n'étoit occupé que de faire sa cour ; qu'il alloit quelquefois chez une petite femme de la ville, nommée madame de La Sablière22 ; mais qu'elle avoit eu force galants, et en avoit encore ; que c'étoit une paysanne à belle passion, qui étoit fort laide ; que ce n'étoit pas pour elle qu'il y alloit ; que c'étoit pour quelque intrigue à qui elle lui étoit bonne ; qu'il avoit donné la charge de secrétaire des dragons à son frère, que l'on nommoit Hessin, qui étoit avec lui au voyage.

Le lendemain, je lui demandai23 qui étoit un homme que j'avois vu dans son carrosse avec l'ambassadeur. Il me dit tout ce que Rochefort m'en avoit dit, hors qu'il ne me dit pas qu'il fût frère de madame de La Sablière ; que c'étoit un garçon de Paris qui avoit de l'esprit ; qu'il l'avoit amené pour tenir compagnie à l'ambassadeur. Le matin que l'on partit d'Avesnes, comme les troupes étoient dans la ville avant que de marcher, il les fallut assembler dans la place. J'étois logée à une maison où il y avoit des balcons, qui donnoient sur cette place. Comme l'on sonna à cheval, je m'éveillai : je me levai vitement et m'en allai voir passer les troupes. Le roi avoit fort parlé des volontaires, qui marchoient en corps et qui avoient deux étendards, que l'on appeloit le fanion.24 Je les vis passer et remarquai les cavaliers. M. de Lauzun alloit et venoit souvent ; il regardoit si j'y étois ; même sil me parla et me dit : « Vous êtes éveillée de bon matin ; » il n'étoit que cinq heures. Je lui dis que j'avois voulu voir les volontaires et leur fanion. Quand je fus en carrosse, je contai tout cela au roi ; j'en fis ma cour à merveille. On retourna dîner à Landrecies, et on passa au Quesnoy, où on séjourna un jour.

 

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NOTES

1. Suite du Menteur, acte IV, scène première.

2. Ce passage, depuis qui lui donneroit jusqu'à il l'a fait, est transcrit sur deux feuilles volantes qui ont été transposées dans le manuscrit aux p. 130 et 131 du t. II.

3. On fait dire à Lauzun dans les anciennes éditions : « Si vous m'en croyez, vous vous établirez un second confident à Paris pour partager votre plaisir ; vous lui déchargerez votre cœur, et il ne vous ennuiera plus, et lorsque vous serez ici, vous m'en parlerez à mon tour. » Il n'y a pas un mot de tout cela dans le manuscrit de Mademoiselle.

4. C'est-à-dire on appelait le cadet M. de Longueville.

5. Charles de Lorraine, comte de Marsan, né le 8 avril 1648, mort le 13 novembre 1708. Voy. ce qu'en dit Saint-Simon (Mémoires, t. VI, p. 429-431, édit Hachette, in-8.)

6. La cour partit de Paris le 28 avril 1670.

7. La cour était à Compiègne le 30 avril. Voy. sur ce voyage de la cour les Lettres historiques de Pellisson, t. I, p. 1 et suiv.

8. 2 mai 1670.

9. Voy. Pellisson, lettre du 4 mai : « On avoit assez prévu que la journée étoit longue et le pays mauvais ; c'est pourquoi le roi résolut de se lever hier à cinq heures et demie et partir sur les sept ; ce qui fut exécuté. »

10. Ces détails, depuis on fit très-mauvais dîner ont été supprimés dans les anciennes éditions sans doute comme trop familiers et remplacés par ces mots quelque incommodité que je pusse avoir.

11. On lit dans la même lettre (4 mai) de Pellisson : « Pour des chariots demeurés, des coffres dans l'eau, tout en a été plein. Le carrosse du maréchal de Bellefonds demeura dans un bourbier, à un quart de lieue, d'où lui et sa compagnie, c'est-à-dire M. de Villars, Rose et Benserade, furent obligés de venir ici à pied. »

12. Les anciennes éditions, qui ont supprimé beaucoup de particularités, en ont ici ajouté. On fait dire à Mademoiselle, en parlant de Lauzun : « Lorsqu'il s'approchoit de lui (du roi), le chapeau à la main, je le pouvois me contenir de lui dire : Faites-lui mettre son chapeau. On trouvera ce trait plus loin.

13. C'est-à-dire pendant la nuit, à la nuit close; on verra plus loin qu'il était dix heures lorsque la cour s'arrêta.

14. Pellisson, témoin oculaire, confirme dans la même lettre tous les détails donnés par Mademoiselle : « Le pis étoit encore qu'il plut beaucoup, de sorte que les eaux, dont tous les pays sont pleins, croissoient à vue d'œil, particulièrement auprès de Landrecies, où ce ne sont que marais entretenus par le voisinage de la Sambre. Nous passâmes, M. d'Avaux et moi, sans que notre carrosse fût inondé. M. de Crussol, qui vint quelque temps après, en eut les portières remplies. M. de Bouligneux, un peu après, désespéra d'en pouvoir sortir, et descendit en un endroit où la terre paroissoit comme un espèce d'île ; puis voyant que les eaux gagnoient même cet endroit, il monta sur un de ses chevaux de carrosse, fit dételer les autres, et laissa le corps du carrosse, qui peut-être y est encore. » (Ibid.)

15. Ce passage, depuis on faisoit grand bruit jusqu'à bruit effroyable, est omis dans les anciennes éditions. Tout le reste du morceau a été changé et est méconnaissable.

16. Il a été question (t. III, p. 404) des Mémoires de Mademoiselle) du mariage de mademoiselle de Gramont avec le duc de Valentinois, prince de Monaco.

17. La cour séjourna à Landrecies du 4 au 6 mai [1670].

18. Le roi alla dîner à Avesnes le 6 mai.

19. Il commença par dire qu'il était honteux d'être ajusté.

20. Il s'agit toujours de Lauzun, comme le prouve la suite du récit.

21. Ce marquis de Rochefort devint maréchal de France en 1675.

22. Cette petite femme de la ville est plus connue que beaucoup de grandes dames, grâce à La Fontaine, dont elle fut la protectrice. Son nom de famille était Hessin ou Lessin. Madame de La Sablière mourut le 8 janvier 1693.

23. A Lauzun.

24. Du mot allemand fahne qui signifie drapeau, étendard. [Plutôt du mot de vieux français fanon (d'où vient le mot fanon en anglais), du mot Franc fano, , IE *pan-, d'où vient le mot allemand.]

 


Mémoires de Mlle de Montpensier, Petite-fille de Henri IV. Collationnés sur le manuscrit autographe. Avec notes biographiques et historiques. Par A. Chéruel. Paris : Charpentier, 1859. T. IV, Chap. X : p. 91-123.


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